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Samedi 11 mars 2017
Cinélatino, 29e Rencontres de Toulouse 2017 du 17 au 26 mars 2017. Paris pieds nus d’Abel et Gordon. Entretien avec les réalisateur.es
Article mis en ligne le 12 mars 2017

par CP

Cinélatino, 29e Rencontres de Toulouse 2017 du 17 au 26 mars 2017

Caliwood, hier, aujourd’hui, demain

Et

Paris pieds nus d’Abel et Gordon, sur les écrans depuis mercredi dernier.

Après Cinéma et politique en 2013, Femmes de cinéma en 2014, L’âge des possibles en 2015 et Figures d’Amérique latine en 2016, Cinélatino se consacre cette année au cinéma de Caliwood (de la ville de Cali en Colombie). Caliwood est une référence importante dans l’histoire du cinéma à l’échelle de l’Amérique latine. Tout a commencé dans les années 1970, avec le groupe de Cali, fondateurs d’un mouvement qui produit des courts et des longs métrages d’expérimentation et d’esprit critique.

Dans les années 1990, l’École de communication de l’Université du Valle est l’épicentre du boom du documentaire. Plusieurs générations d’étudiant.es, de réalisateurs et réalisatrices portent des regards sur les transformations sociales et les pratiques artistiques et culturelles de la ville.

Cette année, Cinélatino s’attache à l’expression d’Andrés Caicedo, Carlos Mayolo, Luis Ospina et Ramiro Arbélaez, aux talents émergents en passant par des rétrospectives et d’une sélection de documentaires couvrant cinq décennies de production cinématographique, magnifique portrait d’une ville et d’un pays, la Colombie.

Entretien avec Catalina Villar, réalisatrice de La nueva Medellín [1] et d’Isabelle Buron.

La nueva Medellin

Les 29e Rencontres de Toulouse, du 17 au 26 mars, présente une sélection en compétition de 12 longs métrages de fiction [2], et de 15 films longs métrages en section Découvertes [3]]]. Sans oublier les courts métrages en compétition et les documentaires ; en tout c’est 150 films à découvrir !
Certains des films ont déjà été présentés dans des festivals : à Venise, au festival Sundance, à Berlin ou à Locarno… C’est donc une magnifique palette, 27 films pou les longs métrages de fiction, issus d’Argentine, de Bolivie, du Brésil, du Chili, de Colombie, de Cuba, du Mexique et de la République Dominicaine. Une très grande diversité, autant par les sujets que par leur traitement. Les films donnent à voir des visions cinématographiques différentes, qui témoignent de préoccupations ancrées, tant dans les territoires latino américains que dans l’universel, et qui abordent de front les domaines sociaux, politiques, mémoriels, intimes… C’est plusieurs autres regards portés sur la réalité et c’est l’expression d’une grande créativité par les images et par les sons.

Les 29e Rencontres de Toulouse, du 17 au 26 mars, offrent une très large perspective des créations cinématographiques en Amérique latine, et de belles découvertes qui laissent espérer que les films seront programmés par la suite dans les salles françaises. Certains le sont déjà : JAZMIN ET TOUSSAINT (La Caja vacía) de Claudia Sainte-Luce (29 mars) ; CITOYEN D’HONNEUR de Mariano Cohn et Gastón Duprat (sur les écrans depuis le 8 mars) ; MATE-ME POR FAVOR de Anita Rocha da Silveira (15 mars).

Cette année, les 29e Rencontres de Toulouse proposent également un focus : CALIWOOD, hier, aujourd’hui et demain. Caliwood est une référence dans l’histoire du cinéma latino américain. Tout a commencé dans les années 1970, lorsqu’un groupe d’ami.es cinéphiles décident d’abord de créer un ciné club et une revue, Ojo al Cine, puis de fonder un mouvement qui va réaliser des courts et des longs métrages, « une époque de camaraderie, d’expérimentation, d’esprit critique et de jouissance ». Toute une programmation de films du groupe est donc proposée, durant un week end, des courts et des longs métrages.

Quant aux reprises, elles seront autant d’occasions de voir ou de revoir des films comme Aquarius de Kleber Mendonça Filho ; El Sicario chambre 164 du réalisateur de Fuocoammare, par-delà Lampedusa, Gianfranco Rosi ; Rara de Pepa San Martin ; Poésie sans fin d’Alejandro Jodorowsky ; Neruda de Pablo Larrain ; Zona Franca de Georgi Lazarevski ; ou encore Un monstre à mille têtes de Rodrigo Plà. Et bien sûr, dans les classiques, L’histoire officielle de Luis Puenzo et Le Sud de Solanas.

http://www.cinelatino.fr/

En plus des Rencontres de Toulouse, et cette fois à Paris, c’est la 2ème édition de Différent Junior ! qui propose, du 13 au 17 mars, aux jeunes et à leurs professeur.es un programme de plusieurs films, longs métrages et courts métrages, en version originale sous titrées, de même que de rencontrer des cinéastes et des artistes. [4]

En deuxième partie de l’émission, c’est un entretien avec Fiona Gordon et Dominique Abel pour leur film qui vient de sortir, Paris Pieds nus.

Paris pieds nus d’Abel et Gordon, sur les écrans depuis mercredi dernier.

C’est une fable dès le départ… Du haut d’une colline canadienne enneigée, une petite fille et sa tante fantasque rêve de Paris, d’un Paris où tout est possible. Martha, la tante saisit sa chance, part à Paris, et bien des décennies plus tard, sa nièce, Fiona, reçoit une lettre contenant une missive étrange trouvée dans une poubelle parisienne. C’est une lettre de Martha qui l’appelle au secours pour ne pas être placée dans une maison de retraite : « j’ai seulement 88 ans ! ». Et pour elle, l’autonomie est essentielle. Alors vive la liberté !

« T’as toujours voulu aller à Paris, vas-y ! » dit la postière. Et voilà Fiona, bibliothécaire de sa petite ville, débarquant dans le métro parisien, avec son look de compagne de Popeye, Olive, et son sac à dos surmonté d’un petit drapeau canadien. Elle se rend à l’adresse de Martha, mais celle-ci a fugué pour éviter l’infirmière. Dans la rue, elle évite les flics et tout ce qui peut ressembler de près ou de loin à une ambulance. Nos deux héroïnes se loupent donc de peu. Alors Fiona part en balade dans Paris, le Paris des hauts lieux du tourisme et puis, à son corps défendant, le Paris de la galère…

Pendant ce temps, Dom se débrouille comme il peut pour manger. La vie n’est pas facile pour lui, il est SDF et a planté sa tente au pied de la statue de la liberté, enfin celle de Paris, sur l’île aux Cygnes. Pas facile en effet, surtout lorsqu’un chien squatte l’habitacle, car Dom n’a nulle envie de partager son petit coin.

Pour Fiona Gordon et Dominique Abel, il s’agissait, dans Paris pieds nus, de « se glisser dans la ville et auprès de ses habitants avec spontanéité. C’est un désir d’expérimentation, d’un peu de bordel et de liberté, que ce soit au niveau du récit, du cadre ou de la musique. On a laissé opérer les hasards, on a composé avec les contraintes des lieux. C’était important pour nous, autant que de préserver notre esprit burlesque, d’ancrer cette histoire dans un milieu réel, peuplé, de faire de Paris un personnage, aussi, au corps cabossé. »

Trois personnages donc, cabossés, chacun à sa manière, qui vont errer, se croiser, danser, rêver, et même tomber dans la Seine, aimer aussi. Et c’est ainsi que de maladresses en maladresses, de situations incongrues en loufoqueries, on entre dans le récit qui, mine de rien, génère une autre vision de la ville, des rapports humains, de la poésie, de la mort, des soi-disant priorités, des travers de chacun et chacune, enfin de l’absurdité des règles et des obligations déclarées. Une histoire comme aucune autre, imaginée par deux clowns de génie, et servie entre autres, par la merveilleuse Emmanuelle Riva en Martha facétieuse.

Fiona Gordon et Dominique Abel viennent du spectacle vivant et veulent transposer cet imaginaire au cinéma, « trouver des trucs, des astuces 
en connivence avec le public. Nous avons emporté cette démarche au cinéma, tout en avançant, de film en film, dans le monde bien réel, concret, d’aujourd’hui.  »

De toute évidence, c’est réussi. Paris pieds nus est une fable touchante et burlesque, une magnifique promenade dans la ville et dans la vie…