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Samedi 18 novembre 2017
La lune de Jupiter de Kornel Mondruczo.
Article mis en ligne le 22 novembre 2017

par CP

La lune de Jupiter de Kornel Mondruczo Entretien avec Kornel Mondruczo Sortie nationale 22 novembre 2017

Retour sur le 39e CINEMED. Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier

Rencontre de Nabil Ayouch, réalisateur du film en ouverture, Razzia, présenté en avant-première (sortie nationale le 14 mars 2018).

Focus sur le cinéma algérien
En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui (8 novembre 2017)
Et Les Bienheureux de Sofia Djama (13 décembre 2017).

Le fond de l’air est bleu réalisé par les collectifs Activideo et Medialien.

La Lune de Jupiter de Kornel Mundruczo. Aryan, un jeune migrant, est blessé par balles en passant illégalement la frontière. Enfermé dans un camp, il découvre qu’il a le pouvoir de léviter. Le médecin qui le soigne, le docteur Stern, comprend immédiatement le bénéfice qu’il peut tirer de la situation. Les miracles, ça fait peur, mais ça s’achète. Il fait évader Aryan, poursuivi cependant par un responsable du camp.

La Lune de Jupiter de Kornel Mundruczo est un film impressionnant par la description violente et réaliste de l’arrivée des réfugié.es en Hongrie, de la brutalité des autorités, du tri des réfugié.es, de la fermeture des frontières, de la corruption à l’intérieur des camps. Le film bascule soudain du thriller au film fantastique. Ou plutôt superposent dans la narration plusieurs genres qui s’imbriquent, la tension ne cesse à aucun moment, sinon lorsque le jeune réfugié syrien lévite. « La vérité réside dans le mélange des genres, pas dans une forme grandiloquente, mais dans l’analyse parabolique de réalités entremêlées ». Et les effets spéciaux, pour une fois, servent remarquablement le propos du film.

D’un côté, il y a la réalité des réfugié.es, isolé.es dans l’espace et le temps, rejeté.es, par les pays qu’ils et elles traversent, évacué.es sans humanité comme pour éradiquer le « problème », et la réalité d’une société européenne régie uniquement par la peur de l’autre et l’intérêt.

Les questions se posent alors sur les migrations obligées qui sont le futur des sociétés, qu’elles soient politiques, économiques ou climatiques. L’arrivée de migrants et des migrantes est-elle une sorte d’électrochoc dans une société en déliquescence qui abandonne ses valeurs ?

La Lune de Jupiter de Kornel Mundruczo est un film troublant et très fort. Un véritable coup de poing.

Le 39e CINEMED. Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier, qui s’est déroulé du 20 au 28 octobre, a permis la découverte d’excellents films et la rencontre de talents cinématographiques marquants, tant dans la réalisation que dans l’écriture ou le jeu. Et cette année, s’ajoute le plaisir de voir plusieurs des films en compétition en voie de distribution en France.

L’ouverture du festival a été formidable avec Razzia, nouveau film de Nabil Ayouch dont il faudra attendre la sortie nationale le 14 mars 2018. D’ores et déjà, il faut dire que c’est une réussite et un grand film. Après ses deux précédents films de fiction, les Chevaux de dieu et Much Loved, Nabil Ayouch s’empare, encore une fois, d’un sujet brûlant au Maroc : la liberté d’expression, sous toutes ses formes, qu’elle soit culturelle, linguistique ou artistique. Refuser les différences, c’est appauvrir la culture : « Le film parle des gens en quête de liberté et du droit d’exprimer leur pensée, d’agir librement et de parler des questions qui les intéressent. En particulier, le droit des femmes à atteindre cet objectif – car je pense [dit le réalisateur] qu’il devient de plus en plus difficile pour les femmes d’être libres dans le Maroc moderne ». L’écriture du film s’est faite avec sa compagne, la comédienne Maryam Touzani, extraordinaire dans le rôle de Salima.

Entre les années 1980 où se situe une arabisation forcée et aujourd’hui, cinq itinéraires de vie se croisent, cinq personnages différents sont mêlés dans une même histoire. Abdallah, l’instituteur qui rêve d’éducation libre et humaniste dans les montagnes de l’Atlas. Salima, une femme qui se veut libre d’être elle-même et indépendante. Joe, qui tient un restaurant à Casablanca. Hakim, un menuisier qui rêve de chanter les chansons de Freddy Mercury. Et la jeune Inès qui s’ennuie dans sa villa luxueuse. Cinq itinéraires et une même soif de liberté dans une ville en effervescence : Casablanca.

La bande son est absolument géniale, cela va de la chanson emblématique du film Casablanca de Michael Curtiz à Queen, dont une chanson interprétée magnifiquement a cappela par Abdelilah Rachid, et à d’excellents groupes marocains. I Want to break free comme chante Freddy Mercury… Je veux me libérer !

Toujours au 39e Cinemed, un focus sur le cinéma algérien nous a donné l’occasion de découvrir une nouvelle vague talentueuse de cinéastes, dont, en avant-première, En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui que l’on peut voir depuis le 8 novembre.

En attendant les hirondelles, c’est un portrait de l’Algérie actuelle à travers trois récits qui s’entrelacent, se font écho et reflètent la diversité de la société algérienne, dans différents milieux et différentes classes sociales. « Cette multiplicité des personnages, avec, en marge des récits, des digressions qui révèlent ou suggèrent d’autres situations possibles » donne au réalisateur, la possibilité d’évoquer par touches, de se saisir des questions majeures de son pays. Autrement dit quels sont liens entre le présent et le passé ? Quel est le poids social des traditions, notamment concernant les femmes.

Karim Moussaoui est une figure importante de la nouvelle génération de cinéastes algériens et son film, En attendant les hirondelles, est voir et à revoir.

Et pour terminer ce premier coup d’œil sur le 39e CINEMED et le nouveau cinéma algérien, voici un extrait de l’entretien avec Sofia Djama à propos de son long métrage, Les Bienheureux, en salles le 13 décembre prochain.

Le film se déroule à Alger, en 2008, 20 ans après les événements d’octobre 1988 et la guerre civile qui a suivi. Amal et Samir vont fêter leur 20 ans de mariage tandis que leur fils Fahim, et ses deux ami.es, Feriel et Réda, traînent en quête d’une autre Algérie. Guerre civile, désillusions, conformisme, révolte, heurts entre générations…

Le film de Sofia Djama a été récompensé à Montpellier. C’est une jeune réalisatrice à suivre et, de même que pour Karim Moussaoui, nous en reparlerons.

Le fond de l’air est bleu, film documentaire réalisé par les collectifs Activideo et Medialien.

Le fond de l’air est bleu présente des témoignages sur les violences accrues de la police, le permis de tuer donné par l’État aux policiers, puisque l’impunité est de règle.

Dans le film documentaire, tout le monde s’exprime, qu’il s’agisse de la colère des policiers qui accusent leur hiérarchie, du constat des victimes face à la violence quotidienne dans les quartiers populaires, mais aussi de la parole des militant.es qui observent les brutalités policières pour faire taire toute contestation sociale. Le malaise ressenti s’amplifie face un ordre étatique de plus en plus meurtrier appliqué par une police non formée.