Chroniques rebelles
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4 histoires fantastiques : Chose mentale de William Laboury. Livraison de Steeve Calvo. Aurore de Mael Le Mée. Acide de Just Philippot
Et Corps étranger de Raja Amari. Wajib. L’invitation au mariage d’Annemarie Jacir. Finding Phong de Tran Phuong Thao & de Swann Dubus
Article mis en ligne le 18 février 2018

par CP

4 histoires fantastiques

Chose mentale de William Laboury

Livraison de Steeve Calvo

Aurore de Mael Le Mée

Acide de Just Philippot

Sur les écrans depuis le 14 février

En compagnie de William Laboury, réalisateur de Chose mentale, et de Francis Gavelle de l’émission "Longtemps je me suis couché.e de bonne heure" sur Radio Libertaire. Et, en différé, Just Philippot pour son film Acide, Steeve Calvo pour Livraison et Mael Le Mée pour Aurore.

4 Histoires fantastiques, quatre films courts, quatre visions aussi originales qu’ancrées dans une réalité proche ou contemporaine, quatre récits cinématographiques pour un renouveau du cinéma de genre.

Chose mentale de William Laboury

Chose mentale de William Laboury est l’histoire d’Ema, jeune fille électro-sensible, vivant dans une maison isolée en plein bois, à l’abri des ondes. Elle tente d’échapper à cette réclusion forcée par la force de son esprit et s’exerce à «  voyager » mentalement dans un monde extérieur.

Imagination, projection mentale, autre forme de réalité ? De quoi brouiller les pistes sur ce qu’est la « réalité » et le voyage mental.

Acide de Just Philippot

Acide de Just Philippot décrit une catastrophe écologique en direct. La menace d’un nuage annonçant un orage de pluie acide jette la population sur les routes dans un exode désespéré. Le sauve-qui-peut est général, violent et sans aucune solidarité.

Au premier plan, un nounours est abandonné dans l’herbe… Il sera inexorablement rongé par la pluie acide au même titre que la peau humaine, le bois, le fer, la nature…

Livraison de Steeve Calvo

Livraison de Steeve Calvo a pour cadre un monde post apocalyptique, où un homme et une femme vivent dans une ferme en ruines. Pour survivre, ils échangent des zombies contre de la nourriture dans une usine. De la catastrophe, on ne sait rien, mais visiblement le capitalisme s’est tout de même recyclé et exploitent les zombies. Michel commence alors son voyage avec un troupeau de zombies affamé.es et enchaîné.es.

Le film inverse littéralement les valeurs, les humains sont les barbares pour raison de survie et les morts-vivants sont les exploité.es. Qu’est-ce que l’humanité ? Des maîtres et du bétail de zombies, on se demande qui sont les monstres.

Aurore Mael Le Mée

Enfin Aurore où il est question de la découverte des possibilités de son corps et de sa sexualité par une jeune fille de 16 ans. Quelles sont les limites du désir et du partage ? C’est l’occasion pour elle de découvrir un pouvoir, celui de traverser, de modeler la chair de l’autre. Libertés, éveil et révélations qui semblent être en quelque sorte encouragées par un magnifique oiseau nocturne, lequel ne représente peut-être qu’une porte sur l’étrange.

Comme l’explique Mael Le Mée, Aurore « est un film de genres, au pluriel, dans le sens “études de genre” ou “queer”. »

Des quatre films, très différents, se dégage une réflexion sur l’humanité, le monde d’aujourd’hui, sur les valeurs inversées face à des situations extrêmes et apocalyptiques…

En dernière partie des chroniques :

Corps étranger

Film de Raja Amari (14 février 2018)

Un film qui aborde plusieurs sujets, celui de l’expression du désir, en particulier du désir des femmes, de la volonté de s’émanciper, de la condition des migrants et migrantes, de l’insertion, de l’islamisme radical en Tunisie et de ses conséquences.
Le personnage de Samia (interprété par Sarra Hannachi) est concerné par tous ces sujets, puisqu’ayant quitté clandestinement la Tunisie, elle se retrouve seule à affronter le quotidien des sans papiers, trouver un travail, avoir un contrat, obtenir des papiers et éviter les amis de son frère devenu islamiste. Pour elle, parvenir à une certaine indépendance n’est pas facile, même si la jeune fille est déterminée et aidée par une femme (Hiam Abbass) qui est attirée par la beauté et la force de Samia.

Corps étranger de Raja Amari est un film ambitieux et ancré dans une réalité contemporaine, à la fois tunisienne et universelle. Exprimer librement le désir féminin est une des facettes les plus intéressantes du film. « Tous les films, ou presque, ont une portée politique. Consciente ou pas [remarque la réalisatrice]. Visible ou pas. Le mien en contient une, puisqu’à travers le personnage du frère de Samia, qu’on ne voit pas, mais auquel elle pense tout le temps, Corps étranger évoque le problème de la radicalisation dans mon pays d’origine et dans le monde. »

Corps étranger de Raja Amari est à voir en salles depuis mercredi dernier.

Wajib. L’invitation au mariage

Film de Annemarie Jacir (14 février 2018)

Avec un humour incisif, Annemarie Jacir filme la journée de Shadi et de son père distribuant en main propre, comme le veut la coutume du Wajib, les faire-part d’invitation au mariage de la fille de ce dernier. Le film se déroule durant une journée, riche en rebondissements, malentendus, vieilles querelles et non dits. Au fur et à mesure des visites, les tensions apparaissent entre le père et le fils, qui est architecte à Rome depuis des années, alors que le père est professeur à Nazareth. Le fils a du s’exiler pour des raisons politiques et le père, s’il est conscient de sa situation de Palestinien ayant des papiers israéliens, essaie de s’arranger d’un contexte parfois difficile. «  Nazareth est la plus grande ville de la Palestine “historique”, aujourd’hui État d’Israël [explique Annemarie Jacir]. C’est la petite minorité palestinienne qui a préféré rester plutôt que mener une vie de réfugiés même s’ils ont été forcés de prendre des papiers d’identité israéliens. Avec une population de 74 000 habitants sur une superficie réduite, les conditions de vie sont tendues, avec une forte concurrence pour le logement et une grande promiscuité entre les gens. »

Le jeu des deux comédiens, Mohammad et Saleh Bakri, également père et fils dans la vie, sert à merveille le propos du film, de même que les nombreux comédien.nes que tous deux visitent durant la journée. Les dialogues sont ciselés, drôles, parfois cinglants et cernent avec finesse les problèmes existant entre la population palestinienne israélienne et les exilé.es. S’ajoute un problème familial, le père vit séparé de la mère des enfants, et ce mariage signifie aussi qu’il va devoir vivre seul après le mariage de sa fille. Tout le monde fait des commentaires plus ou moins ouvertement sur l’arrivée de cette mère ayant quitté le domicile conjugal et sur le fils qui vit à l’étranger et ne compte pas épouser une des jeunes femmes que son père aimerait avoir comme belle fille.

On retrouve dans Wajib toute la verve de Maha Haj, réalisatrice de Personal Affairs, et d’Elia Suleiman, dans son film Intervention divine.

Wajib. L’invitation au mariage d’Annemarie Jacir est sorti le 14 février 2018.

Finding Phong Film de Tran Phuong Thao et de Swann Dubus (14 février 2018)

Finding Phong est un film documentaire qui suit l’itinéraire de Phong, né garçon dans une petite ville vietnamienne, se sentant depuis son plus jeune âge une fille prisonnière dans un corps masculin. À vingt ans, Phong entre à l’université de Hanoi et découvre que sa transsexualité n’est pas unique. Il vit alors en accord avec sa véritable personnalité, se métamorphose et va confronter le regard de sa famille et de ses ami.es face à cette transformation et à sa décision de subir une opération qui la rendra fille comme les autres.

Finding Phong est un film touchant. Il montre toutes les étapes de la transformation de Phong et c’est un véritable document, une enquête personnelle sur la transsexualité.

Le film est sur les écrans depuis le 14 février 2018.