Chroniques rebelles
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Samedi 2 juillet 2005
Rwanda 1994-2004, des faits, des mots, des œuvres
ouvrage dirigé par Laure Coret (L’Harmattan). Avec Laure Coret, Mathilde, Antonin.
Article mis en ligne le 30 janvier 2008

par CP

Cette émission est dédiée à François-Xavier Verschave, disparu le 30 juin dernier. Nous reviendrons plus loin sur son action dans la mise à jour des relations « Françafrique », et les ouvrages qu’il y a consacré.
« Un génocide, et non un conflit ethnique, et non une guerre civile, a eu lieu, au Rwanda, du 7 avril au 4 juillet 1994. »

L’analyse selon laquelle il s’agirait d’un génocide déclenché par la folie des hommes permet d’éviter de poser la question sur la responsabilité des États rwandais et ex-colonisateurs, de passer à la trappe les évidentes complicités françaises tant au plan militaire, politique que financier.
Dans le cas du génocide au Rwanda, c’est l’« aboutissement d’un long processus » :
« Ces morts-là le sont par décision d’États, de longue préparation et de calculs sophistiqués et modernes, par l’arme la plus redoutable qui soit : les voisins, soulevés par 60 ans d’histoire truquée, réveillés par la litanie des listes de personnes à exécuter, par la radio de chaque matin, appelés par leurs dirigeants, leurs curés et leurs maîtres d’école. » Laure Coret, Itsembabwoko (génocide).

Une histoire instrumentalisée, des mots manipulés, tout est brouillé. Par le gouvernement français, socialiste, qui défend ses intérêts et le « pré carré » de la Françafrique, relayé ensuite par des medias qui suivent la version officielle et font « comme si ce génocide n’était qu’un phénomène collatéral d’une guerre civile, [or] les responsables civils et militaires de la France ont favorisé de fait son accomplissement. »

Rwanda 1994-2004, des faits, des mots, des œuvres , décrypte les termes, les déclarations, les phrases soi-disant anodines, les témoignages et soulève à nouveau bien des questionnements : Quelle est la part des responsabilités politiques et militaires françaises dans le génocide au Rwanda ?
Peut-on parler de génocide programmé, de guerre totale – selon la doctrine militaire – à l’encontre d’une partie de la population ?
Quels sont les origines et les enjeux des massacres ?
Quel est le rôle de l’opération Turquoise, proclamée opération humanitaire alors les survivants des massacres ne furent pas immédiatement secourus, et parfois même furent livrés aux miliciens ?
Pourquoi des armes ont-elles été livrées aux responsables génocidaires pendant les massacres ?
Comment expliquer le soutien du gouvernement français aux responsables du génocide ?
Pourquoi ce silence dans les médias et la manipulation de l’information ?
Dix ans après, quelle est la situation des victimes, rescapées des massacres ?

Les représentants de la Mission d’information parlementaire ont conclu à des « maladresses » et à des « erreurs » de la politique française au Rwanda. C’est un peu léger et elliptique s’agissant d’un million de morts, pour une grande part des civils.
Les attitudes, les questions, le silence, la logique de négation nous renvoient immanquablement au racisme institutionnel et à l’idéologie qui a justifié la colonisation :
« L’ampleur et la nature de l’histoire coloniale française, la complète normalisation, dans toute la classe politique, des crimes de guerre accomplis dans le cadre d’une histoire revendiquée comme glorieusement républicaine, en particulier dans l’Algérie voisine, entrent pour une part décisive dans l’assise inébranlable de cette tradition de déni. »