Chroniques rebelles
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Samedi 5 avril 2008
Poutine. Le Parrain de toutes les Russies
Jean-Michel carré (Saint-Simon)
Article mis en ligne le 7 avril 2008

par CP

« Le véritable travail du documentariste est de témoigner de la place de l’homme dans le système, celui qu’il s’impose comme celui qu’il invente. J’ai toujours été préoccupé par ceux qui, mus par la volonté de changer les relations humaines, s’investissent dans la sphère sociale et politique. Je ne cède pas à l’aigreur des fins de partie, mais questionne encore les initiatives nouvelles, les différentes façons de vivre avec l’autre, de construire la collectivité et de bâtir un avenir différent. L’expérience de la collectivité se fait sur tous les plans. Mes films sont construits avec les acteurs de ces aventures et autour des initiatives qu’ils tentent de mettre en place ; que ce soit dans le domaine de l’éducation, de la mondialisation ou bien encore de la maladie mentale. Le film lui-même devient alors une expérience collective. »
Jean-Michel Carré

Dans la présentation du film de Jean-Michel Carré, Le Système Poutine , la question immédiate et récurrente était : Mais qui est Poutine ?

Avec le livre, qui fait suite à la réalisation du film, la question est : « En quoi les quarante dernières années chaotiques de la Russie ont-elles permis l’émergence de ce nouveau grand maître du pouvoir, dirigeant d’un nouveau type, qui va changer les destinées du peuple russe mais aussi du monde ? »
Car il est vrai que l’émergence d’un homme de pouvoir, venant de l’ombre, et se voulant symboliser la « renaissance » de la Russie — façon quelque peu tsariste — a de quoi étonner et inquiéter. L’image de Staline n’est pas loin, même si le contexte est différent.

Dans Poutine. Le Parrain de toutes les Russies , Jean-Michel Carré démonte Le système Poutine en retraçant le parcours d’un homme de l’ombre, d’un « petit homme », d’une éminence grise, qui a, petit à petit, construit un personnage et un environnement à la mesure de sa personnalité autoritaire qui n’accepte aucune critique.

Retour sur une ascension au pouvoir…

La mission de Gorbatchev a été de « réserver l’empire soviétique, tout en lui donnant une nouvelle forme avec l’économie de marché » et de «  transférer les biens de l’État aux mains des gens du parti communiste qui pouvaient devenir des hommes d’affaires ».
Après l’élite politique, l’élite économique s’installe avec son cortège de mafieux et de nouveaux riches.

Poutine s’occupe alors de la privatisation à Leningrad / Saint Petersbourg. Gorbatchev écarté, Poutine est dans l’entourage d’Eltsine… Il devient le patron du FSB — ex-KGB — et, finalement, est nommé Premier ministre…
Le système Poutine se met en place.

« L’objectif de Poutine est de recréer la Grande Russie et d’être celui qui la dirigera. C’est le but qui justifie n’importe quels moyens. Que ce soit la guerre en Tchétchénie, les intrigues en Ukraine, les manipulations par le gaz, l’anéantissement de l’opposition, le contrôle des médias ou les relations particulières avec l’Iran… » D’ailleurs, comme le déclare le général Alexandre Lebed, « La guerre de Tchétchénie a beaucoup plus à faire avec le business qu’avec la politique ! »

Mais quelle est la différence entre politique et business ?

Manipulations sur fond d’islamisme et de guerre antiterroriste, attentats meurtriers pour le moins troublants et fort bien orchestrés… Le but est de provoquer la seconde guerre de Tchétchénie. Alors que celle-ci est imminente, les déclarations de Poutine à propos des Tchétchènes —« Ces gens ne sont pas des êtres humains, ce sont des animaux, des animaux enragés ! » — relancent une campagne de xénophobie qui ne dit pas ses objectifs réels. Et quand on pense à la souffrance des populations et aux massacres de civils, cela fait froid dans le dos !

Quel est alors le rôle des médias et de la télévision dans la campagne de propagande contre la Tchétchénie ? Quels sont les intérêts de la classe politique et des oligarques ? Pourquoi cet acharnement de Poutine ? L’enjeu du pétrole ou le passage d’un oléoduc ?

« Nous allons tous les exterminer, nous poursuivrons les terroristes partout, même dans les toilettes s’il le faut. On les butera jusque dans les chiottes. » Des paroles haineuses servant d’exutoire et une stratégie pour détourner l’opinion publique russe des problèmes sociaux.

Même cynisme et même mépris des vies humaines dans l’épisode du Koursk :
« Un sous-marin a coulé, 118 marins sont morts, un milliard de dollars a disparu dans la mer, et alors ? Qu’est-ce qui a changé ? Rien ! […] Que va-t-il se passer la prochaine fois ? Quel nouveau cataclysme va encore se produire dans notre pays et qui va encore en souffrir ? »

Et Poutine est réélu en mars 2004 avec 71% des voix.

Mais « Tous les intellectuels russes connaissent cette phrase de Staline : “L’important, ce n’est pas comment les gens votent, mais comment on compte les votes. »

« Le but ultime de Vladimir Poutine dans sa politique énergétique sera la création, en partie sur les ruines de Ioukos, d’un géant étatique pétrolier et gazier, qui deviendrait l’instrument politique central du Kremlin. Cette politique vise à faire de la Russie, dans la décennie à venir, un acteur majeur de la scène pétrolière et gazière mondiale, dans l’idée de rivaliser un jour avec les pays du Golfe. »
Et pour y parvenir, c’est la « paix froide » afin de se partager le monde avec la première puissance mondiale — les États-Unis — et tenir le pays où « règne “l’Ordre avant la liberté” ».