Chroniques rebelles
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Un autre futur de Richard Prost et les films de la CNT
Cinéma et révolution sociale
Article mis en ligne le 26 janvier 2009
dernière modification le 15 mars 2009

par CP

Lire la suite dans http://divergences.be/spip.php?article1318 à partir du 1er février 2009

« Il fut un temps durant lequel le prolétariat espagnol a pris en main la production et la distribution, durant lequel le capitalisme a disparu, de fait. » Trois années durant lesquelles le capitalisme a perdu son pouvoir. C’est sur ce rappel de Federica Montseny que commence le premier des quatre films de Richard Prost — Un autre futur .

Quatre films, quatre parties de cette histoire libertaire espagnole. Quatre films qui sont un enseignement pour ceux et celles qui souhaitent un autre monde. Je demande la parole revient sur les origines de la CNT et les raisons de la Révolution sociale. Sous le signe libertaire décrit la Révolution sociale de 1936, puis la Guerre d’Espagne. Il n’y a plus de fous relate la fin de la guerre et l’exil. Et enfin : Contre vents et marées où il est question de la Seconde Guerre mondiale, de la Résistance en France, de la Libération de Paris, de la Résistance en Espagne jusqu’à la fin des années 1970.

Federica Montseny ouvre le film en disant qu’il faut lier le passé au présent. Ce qui s’est passé en Espagne, entre 1936 et 1939, est en effet exemplaire et la preuve manifeste que le prolétariat peut changer le monde et peut initier un autre futur.

Richard Prost : La Révolution espagnole est plus qu’une expérience, c’est la réalisation d’une mise en pratique d’idéaux révolutionnaires durant deux ou trois ans et c’est l’exemple parfait pour tenter de comprendre, d’entrevoir comment vivre autrement. Malheureusement, en France, cette histoire a été occultée parce que cela a gêné des personnes situées plutôt dans le courant d’extrême gauche, ce qui demeure incompréhensible pour moi. La seule expérience qui vaut la peine qu’on s’y intéresse, c’est la Révolution espagnole, avec la Commune, qui est plus ancienne. Ce sont des événements historiques importants. Pourquoi refuse-t-on d’en parler en France ? C’est un mystère pour moi.

C P : Le fait qu’on ne parle pas de Révolution espagnole, mais de « Guerre d’Espagne » est remarquable. La guerre dévore la Révolution, [1] si l’on reprend la formule d’Henri Paechter. Pour faire référence à cette période, il est vrai que la plupart des gens parlent de « Guerre d’Espagne ». Pourtant, c’était avant tout une Révolution.

Richard Prost : C’est pourquoi j’insiste toujours pour dire que le film, conçu avec Aimé Marcellan, n’est pas un film sur la Guerre d’Espagne — que l’on voit dans l’une des parties —, mais sur l’idéal de la CNT et les contenus de la Révolution sociale. On parle évidemment aussi de résistance puisque le film couvre du début du XXe siècle jusque dans les années 1970. Mais une grande partie du film traite du terreau révolutionnaire en Espagne, des raisons qui ont mis en place cet idéal, et de la force des hommes et des femmes qui ont participé à ce mouvement. Parfois, j’ai l’impression de ne pas être français, car ici on semble ignorer qu’au moins deux millions de personnes sont concernées par cette expérience révolutionnaire, et cette estimation est faible. Mais cela ne semble pas suffire pour qu’on en parle ! Que faut-il aux militant-e-s pour que cela les intéresse ? D’un côté, on donne des détails sur le POUM — s’il n’est pas trotskiste, est assimilé tel — qui rassemblait environ 3 000 personnes en 1936. Même chose pour le parti communiste : en juillet 1936, il n’y avait que 13 000 adhérents au parti communiste espagnol. Le masquage de la Révolution libertaire espagnole m’étonne toujours. Comme quoi la politique politicienne est toujours très forte pour arriver à de telles aberrations.