Chroniques rebelles
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Anatomie Bousculaire. Et SRI LANKA : Cinéma et société
Samedi 28 mars 2009
Article mis en ligne le 29 mars 2009

par CP

Anatomie Bousculaire dans les Chroniques rebelles

«  La parade des mutantes  »

Ou «  Les mondes engourdis  »

«  Ma cité d’or, cité de feu, cité d’étoiles trop policées,

L’égalité a changé de bords,

Le rejet de greffe s’est emballé

Cité dortoir, cité d’horreur, ma cité lasse, abandonnée

La dignité recrache sa flore, face à sa rage de liberté  »

Trio rock de filles, Parade de mutantes.
Anatomie Bousculaire, il faut les voir en concert, sur scène, pour l’énergie qu’elles dégagent, la poésie rebelle qu’elles exhalent, l’osmose qui s’opère entre textes, musique, rythme, cris…

Vendredi 3 Avril à LA BOULE NOIRE, Paris

http://www.myspace.com/anatomiebousculaire

http://www.youtube.com/watch?v=m0oq5Gppir4

En deuxième heure :

SRI LANKA : Cinéma et société

Que connaissons-nous du Sri Lanka ? Le mouvement des Tigres tamouls occupe parfois les pages des medias ou bien c’est une catastrophe climatique, comme le tsunami. Mais finalement, il ne reste du Sri Lanka qu’une image lointaine, essentiellement dangereuse, liée au Sud du continent indien.
Des enjeux politiques, de la répression, de la guerre entre les forces gouvernementales et les Tigres tamouls, de la population prise en otage dans les zones du conflit, nous ne savons pas grand-chose. Et pour cause ! Les journalistes et les observateurs ne sont pas autorisés à s’y rendre, ou même sont assassinés en ce qui concerne les journalistes indépendants et les humanitaires.

La situation du pays, la culture, la diversité de la société sri lankaise, les problèmes de violence sont décrits par un cinéma d’auteur qui, depuis quelques années, est un véritable miroir des problèmes sociaux du pays, de son évolution et de ses luttes. Des cinéastes engagés expriment effectivement le quotidien, les révoltes d’une population, et en particulier la situation des femmes.

Nous sommes loin ici des films de Bollywood.

Mais ce cinéma d’auteur est tout à la fois critique et populaire. La censure ne s’y trompe pas qui, par exemple, bloque le film du réalisateur Ashoka Handagama, réalisateur de Aksharaya (Lettre de feu). Plusieurs réalisateurs de la même génération évoquent directement la pression sociale sur les femmes, leur rôle établi et leur prise de conscience parfois douloureuse.

C’est le cas de Prasanna Vithanage qui, dès son premier film, Sisila Gini Gani (Ice on Fire), en 1992, a donné une place prépondérante dans ses films aux personnages féminins, avec des portraits complexes et profonds de femmes qui évoluent entre séduction, volonté d’émancipation, revendication de droits égalitaires et folie. Si la société sri lankaise est multiculturelle, le déni des droits des femmes n’en est pas moins une tendance marquée.

Droits des femmes, mais aussi évocation de la situation engendrée par la guerre civile, ou devrais-je dire la guerre aux civils puisque toute une partie de la population est victime des bombardements, d’arrestations arbitraires, d’enlèvements, d’exécutions ou d’enrôlement forcé avec, pour seule alternative, l’exil… Quand cela est possible.

Akasa Kusum (Flowers of the Sky)

Le nouveau film de Prasanna Vithanage

Prasanna Vithanage, né en 1962, est représentatif d’une nouvelle génération de cinéastes. Avant son premier film, en 1992, il a mis en scène des pièces de théâtre engagées dans les années 1980. Son cinéma est empreint d’humanisme et porte un regard critique sur la société srilankaise. Il en montre les contradictions et les troubles, légèrement, comme en passant, pour laisser au public l’espace de la réflexion. Il faut néanmoins souligner son courage car certains de ses films font allusion à des sujets tabous au Sri Lanka : la guerre et les deux insurrections de la jeunesse sri lankaise dont la dernière a fait place à une période de terreur.

La filmographie de Prasanna Vithanage est impressionnante, Ice on fire (Sisila Gini Gani) (1992), Dark night of the soul (Anantha Rathriya) (1996), Walls within (Pawuru Walalu) (1997), le très beau Death on a full Moon day (Purahanda Kaluwara) (1997) et enfin August Sun/Soleil d’août (2003), fresque remarquable de destins croisés dans une société déchirée par la violence. Un récit documentaire.

Le Sri Lanka, ravagé depuis vingt ans par la guerre civile. Trois intrigues se déroulent en parallèle dans trois régions différentes du pays, durant deux chaudes journées du mois d’août. Trois histoires de gens ordinaires, pris malgré eux dans les affres d’une guerre civile dévastatrice.

Duminda, un soldat en permission, se rend dans un bordel. Il y découvre que Kamani, sa sœur, s’y prostitue. Kamani prend peur en le voyant et s’enfuit. Le propriétaire de l’établissement retient alors Duminda en otage.
Au même moment à Colombo, la capitale, Chamari, une jeune femme, regarde la télévision. Un journaliste y parle de sa prochaine visite dans la région des rebelles. Chamari téléphone à la chaîne de télévision et demande à lui parler. Elle veut partir avec lui à la recherche de son mari, soldat disparu au combat dans cette région.

Dans la région sous le contrôle des rebelles, Arafat, un jeune garçon d’onze ans, joue avec son petit chien lorsqu’il voit les rebelles demander aux musulmans de quitter la région dans les vingt-quatre heures.

Les personnages de femmes rebelles, volontaires et autonomes tiennent une place rémanente dans les films de Prasanna Vithanage. Des femmes qui luttent et refusent le rôle qui leur est assigné…

La relation hommes/femmes y est analysée avec nuance, mais sans concession. Qu’il s’agisse de Walls within où la mère, personnage principal, se révolte contre la rumeur : "quand votre père est parti, personne n’a rien dit !", ou bien de la jeune actrice qui se refuse à jouer l’épouse modèle dans Akasa Kusum (Flowers of the Sky), son dernier film. Un très grand cinéaste.

Présenté au festival des cinémas d’Asie de Vesoul, le film de Prasanna Vithanage est une occasion de découvrir son rapport à la société srilankaise, au cinéma et à la télévision. Akasa Kusum (Flowers of the Sky) met en scène une actrice populaire qui ne tourne plus et une jeune comédienne de feuilletons télévisés. Un monde de femmes, sur plusieurs générations, qui s’affirme, s’affiche et se bat.

Avec Louise.