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Samedi 13 décembre 2014
La fin du capitalisme. Et la nécessaire invention d’un monde nouveau. Mumia Abu Jamal : abrogation de la loi du silence
Article mis en ligne le 15 décembre 2014

par CP

La fin du capitalisme

Et la nécessaire invention d’un monde nouveau

Christian Cauvin (L’Harmattan)

Et

Abrogation de la Loi privant de leur droit d’expression les prisonnier-es de Pennsylvanie

Dans la seconde partie de l’émission, nous parlerons avec Claude Guillaumaud Pujol de la nouvelle loi du silence qui vise à priver d’expression les prisonnier-es dans l’État de Pennsylvanie. Cela revient à un double enfermement, une double peine, et c’est aussi une façon de dissimuler les conditions carcérales et l’arbitraire qui règne dans les zones de non-droit que sont les prisons étatsuniennes.

Mais tout d’abord La fin du capitalisme. Et la nécessaire invention d’un monde nouveau de Christian Cauvin.

La fin du capitalisme… Si la crise du système capitaliste donne l’impression de sa fin imminente, le système s’arrange généralement de la crise pour repartir ensuite de plus belle, après évidemment des dégâts sur les populations, et avec d’autres protagonistes. Les mots et les slogans magiques, en revanche, ne changent guère — progrès, croissance, consommation —, s’y adjoignent parfois quelques variantes choisies dans la Novlangue, selon les modes et les circonstances. Il faut reconnaître que le capitalisme s’est maintes fois recyclé, malgré les prévisions de sa fin. Quelle est, dans ce cas, la spécificité de la crise actuelle qui permettrait d’anticiper la fin du capitalisme ?

« Quand la gouvernance déraille à la face du monde, quand les méfaits des institutions financières concourent à la faillite des peuples, quand des banques mille fois milliardaires se dédommagent des inconséquences de leurs apprentis sorciers en aspirant les finances publiques, quand des escrocs quittent leur conseil d’administration les poches pleines [1] », est-ce autant de signes avant-coureurs de la fin du capitalisme ? Tel un phénix, le système renaît des crises qu’il a provoquées, sur le dos de ceux et de celles — la majorité — qui le subissent, bon gré mal gré.

« Le capitalisme s’est construit à partir de l’imaginaire de la croissance, du progrès et de la consommation. Une croissance sans limites, un progrès permanent, une consommation qui devient le fondement identitaire de l’individu et qui lui offre la représentation de ce qu’il doit être. »

L’accumulation des marchandises et la croissance illimitée… Voilà que le programme présente un bémol cependant, les ressources naturelles sont limitées et ne se régénèrent pas au rythme imposé par la surexploitation et la loi du marché. La raréfaction des ressources naturelles, notamment en eau, des ressources énergétiques et la mise en danger de l’écosystème suscitent certes des inquiétudes, mais certainement pas, jusqu’à maintenant, une prise de conscience générale.

Quand il s’agit de profit, l’aveuglement et la surdité sont de mise, et les appels à la raison ne freinent pas la course à la production. Peu importe l’irréversibilité de la catastrophe écologique, on innove dans le genre « capitalisme vert » et autres niaiseries, sans tenir compte des signes précurseurs pourtant bien visibles depuis des décennies. Le profit à court terme et le « après nous le déluge ! » dominent en grande partie nos sociétés, le capitalisme étant vanté comme une des conditions de la soi-disant « démocratie », autre mot magique mis à toutes les sauces.

Christian Cauvin, avec La fin du capitalisme. Et la nécessaire invention d’un monde nouveau, fait le constat du système capitaliste en place et souligne ses limites… Mais se pose alors la véritable question de la fin du système capitaliste, et comment empêcher l’émergence d’une autre forme ou d’un autre cycle du système. Autrement dit, comment construire un monde basé sur la solidarité et comment mettre fin à un système basé sur la domination et l’exploitation ?

Entretien avec Christian Cauvin

Abrogation de la Loi privant de leur droit d’expression les prisonnier-es de Pennsylvanie

Cette loi nommée « Revictimization Relief Act » donne un pouvoir discrétionnaire quasiment illimité aux procureurs de district et au Procureur général de priver les prisonniers et prisonnières du droit à la parole, au prétexte que toute expression de leur part provoque « l’angoisse » des familles des victimes.

Cette loi vise à la fois les prisonniers et les soutiens qui les parrainent.
Ainsi, sous couvert de protéger les victimes, les politiciens s’octroient un pouvoir qui sera difficile, voire impossible, à contrôler pour les citoyen-nes.

En cherchant à faire taire les prisonnier-es, la loi établit un précédent qui met en cause le Premier Amendement de la Constitution des États-Unis.
Avec cette violation de la liberté de parole, l’État de Pennsylvanie prive
en effet les citoyen-nes de leur droit de savoir et de comprendre ce qui se passe dans les prisons.

Un recours a été déposé auprès de la justice par des prisonniers (dont Mumia Abu-Jamal), des avocats et des associations de défense des droits humains, des enseignants et des journalistes.

Entretien avec Claude Guillaumaud Pujol, auteure de Prisons de femmes. Janine, Janet et Debbie : une histoire américaine (Temps des cerises).

Pétition en ligne :

http://act.rootsaction.org/p/dia/action3/common/public/?action_KEY=10521

www.mumiabujamal.com



Un recours contre la loi de censure votée par le Congrès de Pennsylvanie visant à faire taire Mumia Abu-Jamal et tout autre prisonnier accusé d’homicide a été déposé moins d’un mois après que le Gouverneur Corbett ait promulgué cette loi qui faisait partie de son programme de campagne en vue de sa réélection [2].

Abolitionist Law Center, Amistad Law Project et le Roderick and Solange MacArthur Justice Center représentant Mumia Abu-Jamal, Prison Radio, Educators for Mumia, Kerry « Shakaboona » Marshall, Robert L. Holbrook et Human Rights Coalition ont formalisé ce recours au Middle District contre le procureur de Pennsylvanie Kathleen Kane et le procureur de Philadelphie Seth Williams.

Rappelons que la loi « Senate Bill 508 » autorise le procureur de Pennsylvanie, les procureurs de régions et les victimes d’homicide ou de violences physiques à poursuivre en justice les accusés pour « séquelles prolongées sur les victimes ». Il est désormais possible de porter plainte pour « des actes engendrant une angoisse temporaire ou permanente » chez les victimes.

«  Cette loi est inconstitutionnelle. Le Congrès de Pennsylvanie et le Gouverneur Corbett voulaient utiliser le cas Abu-Jamal pour marquer des points pendant la campagne pour la réélection du gouverneur … Nous déposons un recours contre le procureur de Pennsylvanie Kathleen Kane et le procureur de Philadelphie Seth Williams avant qu’ils n’empêchent Mumia de s’exprimer publiquement » a déclaré Bret Grote, responsable juridique de Abolitionist Law Center.

Quelques jours après le discours de Mumia pour la remise de diplômes à l’Université du Goddard College (Vermont), la Chambre des Représentants de Pennsylvanie a voté la loi « Senate Bill 508 ». La loi a été adoptée au Sénat le jour suivant puis le Gouverneur Corbett l’a promulguée, soit 16 jours seulement après le discours de Mumia.

Abu-Jamal a passé 33 ans en prison dont 30 ans à l’isolement dans le Couloir de la Mort après avoir été condamné en 1982 au terme d’un procès jugé « non conforme aux critères fondamentaux de la justice » par Amnesty International.

Mumia Abu-Jamal a déjà écrit trois discours pour remise de diplômes universitaires : en 2008 également pour Goddard ; en 2000 pour l’Université d’Antioch (Etat de l’Ohio) et en 1999 pour l’Université d’Evergreen (État de Washington). Il a écrit et enregistré plus de 3.000 textes, publiés sept livres traduits en neuf langues, et deux autres ouvrages devraient être publiés en 2015. Trois films ont été tournés sur son histoire, le dernier Mumia, Long Distance Revolutionary a été projeté dans de nombreuses villes étatsuniennes et 20.000 DVD ont été vendus.

« Ce n’est pas la première fois que l’État de Pennsylvanie veut faire taire Mumia » dit Noëlle Hanrahan de Prison Radio, précisant que « depuis 1996, sous la pression du Fraternel Order of Police [puissant syndicat de police], la direction de la pénitentiaire a interdit à Mumia, ainsi que à tous les prisonniers de Pennsylvanie, d’être interviewés par des journalistes ».

En mai 1994, un programme comportant une série de textes de Mumia qui devaient être diffusées sur National Public Radio avait été annulé suite aux menaces du Sénat américain de suspendre toute subvention à cette radio nationale, prétextant qu’un prisonnier ne devait avoir ni profession, ni salaire. La Cour de justice du Troisième Circuit (District de Philadelphie) avait jugé la décision inconstitutionnelle car contraire aux droits garantis par le 1er Amendement.

« Le Congrès de Pennsylvanie a voulu punir Mumia et, en même temps, il prive de leurs droits fondamentaux quantité de personnes encore en prison ou déjà libérées » déclare Nikki Grant, responsable de Amistad Law Project.
Il s’insurge même contre « cette loi qui va condamner au silence beaucoup
de gens, notamment des gens déjà totalement marginalisés dans notre société
 ».

Patricia Vickers, de Human Rights Coalition, dénonce « la violation permanente des droits fondamentaux des personnes incarcérées par la direction des prisons de Pennsylvanie ». Composée de prisonniers, de familles de prisonniers, d’anciens condamnés et de militants associatifs, elle rappelle que l’action de son association « consiste à représenter les prisonniers et à dénoncer les maltraitances dont ils sont l’objet. Désormais, avec cette loi, ils auront trop peur de parler » dit-elle.

« Les gens qui ont vécu la violence ont besoin d’être soignés, réinsérés ; les empêcher de s’exprimer ne va rien résoudre » dit Ashley Henderson d’Amistad Law Project.

« Comment les élus ont-ils pu voter une telle loi » dit Mumia Abu-Jamal,
« sachant qu’ils violaient délibérément la Constitution des États-Unis, la Constitution de Pennsylvanie et leur propre serment de servir la nation ».

Pittsburgh, Pennsylvanie, 10 Novembre 2014



LORETTA LYNCH REMPLACE ERIC HOLDER AU MINISTERE DE LA JUSTICE DES ÉTATS-UNIS

Le départ d’Eric Holder n’est pas réellement une surprise car il l’avait annoncé à plusieurs reprises ces derniers mois. S’agissant de Mumia Abu-Jamal, on ne peut que regretter l’absence d’initiative de la part d’Eric Holder pour sortir cette affaire du déni de justice dans lequel elle s’est enferrée depuis plus de 30 ans. D’autant que dans une interview récente (Magazine Politics), il se déclare toujours opposé à la peine de mort, allant même jusqu’à critiquer la nocivité du système carcéral et judiciaire en rappelant cette vérité : les États-Unis représentent 5 % de la population mondiale mais 25 % des détenus de la planète !

Comme chaque premier mercredi du mois, nous donnons rendez-vous aux franciliens pour exiger la libération de Mumia Abu-Jamal. Rappelons que le journaliste noir américain a déjà passé plus de 33 ans en prison dont 30 dans l’enfer du couloir de la mort. Il a toujours clamé son innocence sans jamais pouvoir la défendre face à un système judiciaire raciste et inéquitable. Arrêté et incarcéré à l’âge de 28 ans, il a eu 60 ans le 24 avril dernier. Marié, père et grand-père, Mumia veut "rentrer à la maison". Agissons pour que sa libération et son retour auprès de siens interviennent le plus vite possible.

Ce rassemblement sera aussi l’occasion de protester contre la Loi "anti-Mumia" promulguée par le Gouverneur de Pennsylvanie. En effet, faute de pouvoir interdire le droit à la parole et à l’écriture au seul citoyen Mumia Abu-Jamal, cette loi, adoptée en procédure d’urgence, prive désormais tous les prisonniers et anciens prisonniers de Pennsylvanie de leur droit d’expression. Il en est de même pour les familles des prisonniers (et leurs soutiens) qui s’exposeront à des poursuites judiciaires dès lors qu’ils s’exprimeront publiquement sur les condamnations de leurs proches ou les conditions de la vie carcérale.

Cette législation liberticide et inconstitutionnelle fait l’objet d’un recours en justice déposé par des organisations de défense des droits humains, des journalistes et des prisonniers.

LE COLLECTIF FRANÇAIS "LIBÉRONS MUMIA" rassemblant une centaine d’organisations et de collectivités publiques

www.mumiabujamal.com