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Samedi 7 octobre 2017
Bricks, film documentaire de Quentin Ravelli. Taxi Sofia, film de Stephan Komandarev. 39e CINEMED. 5e Panorama du cinéma colombien.
Article mis en ligne le 12 octobre 2017
dernière modification le 15 octobre 2017

par CP

Bricks Film documentaire de Quentin Ravelli (18 octobre)

En compagnie de Quentin Ravelli et de Daniel Pinos

Un point sur les événements en Espagne avec Daniel

Taxi Sofia Film de Stephan Komandarev (11 octobre 2017)

Une fiction en prise avec la situation sociale actuelle de la Bulgarie

39e CINEMED : Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier du 20 au 28 octobre 2017

Focus sur le cinéma algérien

Et

5e Panorama du cinéma colombien, à Paris cette fois

Du 11 au 17 octobre au cinéma Reflet Médicis, mais aussi à l’Arlequin

Bricks de Quentin Ravelli… La crise économique de 2008 frappe de plein fouet l’Espagne et c’est toute la population qui en subit les conséquences. Le chômage atteint les 27 % en 2012 et des centaines de milliers de personnes sont confrontées à l’incapacité de rembourser leur crédit immobilier. Elles sont expulsées de leur logement sans pour autant éponger leur dette auprès de la banque. De quoi craquer sans d’ailleurs comprendre exactement ce qui se passe. C’est ce que raconte le film de Sylvia Munt, Afectados, sorti en 2016. À Barcelone, un collectif se met alors en place pour aider les victimes des prêts toxiques. Jamais ces hommes et ces femmes n’avaient imaginé se retrouver brusquement à la rue, sans boulot, et acculé.es à rembourser des prêts aux banques pour un logement dont on les a expulsées. À la stupeur et au désespoir répondent l’entraide, la solidarité, et une organisation pour résister à un système ubuesque.

Bricks, le film de Quentin Ravelli poursuit le constat d’une Espagne dont la crise s’aggrave. L’exemple des expulsions pour non-paiement de crédits immobiliers élevés en est un exemple frappant d’absurdité, ce qui fait dire que « ce n’est plus une crise, mais une arnaque ». On estime à plus de 5 millions les logements vides après expulsion, des logements que personne ne peut racheter ou louer et qui se dégradent.

Le résultat, c’est la ville fantôme de Valdeluz. Une ville toute neuve aux briques rutilantes et aux infrastructures impressionnantes, mais vidée de ses habitants et de ses habitantes. Et là, le film bascule quelque peu dans la science-fiction. Valdeluz, ville modèle dont le projet a été abandonné depuis 2008. L’usine de briques, elle, tourne toujours, mais sans la perspective de constructions à venir.

« J’avais à l’esprit [explique Quentin Ravelli] le tressage d’une natte liant ces différents éléments qui ne se rencontrent pas physiquement dans la réalité : le maire qui se bat pour remplir sa ville fantôme, les gens qui s’organisent pour se battre contre les banques afin de faire annuler les dettes, et bien sûr l’industrie de la brique. D’où la forme en mosaïque du film, le point de vue sur la crise se déplace sans cesse, ce qui permet d’en comprendre les différentes facettes. »

Brique, ladrillo en español.

1. C’est une masse d’argile, en forme de parallélépipède rectangulaire, qui, après cuisson, sert à construire des murs, des logements.

2. Élément de construction similaire à une brique faite d’une autre matière.

3. Travail sous la forme d’une brique composé de certains tissus.

4. Une chose lourde ou ennuyeuse.

Le film de Quentin Ravelli commence par l’image impressionnante d’un cimetière de briques, le symbole de la bulle immobilière en Espagne. Cette masse d’argile qui a été utilisé pendant des années pour la spéculation est l’objet utilisé par le réalisateur pour unir différentes histoires qui parlent du passé récent de ce pays. En suivant la vie de cette brique, nous rencontrons les trois protagonistes du film : une usine de briques, la ville de Valdeluz et la Plate-forme des victimes de l’hypothèque de Madrid, la PAH. Il serait ridicule de penser qu’un simple objet inerte est à l’origine de la situation politique dont souffre le pays. Le véritable coupable est la production désordonnée du système économique, qui a commencé à construire au-delà de la demande de logements. Ensuite, pour augmenter plus encore ses profits, ce système a créé la spéculation en provoquant la hausse continue des prix jusqu’à ce que les voleurs, les banquiers et les promoteurs, arrêtent de se remplir les poches — non pas par manque de désir de continuer à voler, mais parce qu’il n’y avait plus rien à voler — alors le pays est rentré dans une crise qui n’a affecté qui eux qui n’avait pas volé leur part du gâteau, les plus pauvres et les plus fragiles économiquement.

Les différentes histoires alternent, en dessinant un croquis général de la réalité espagnole. D’une part, l’usine de briques, qui a dû arrêter en partie sa production, non pas parce qu’elle n’était pas compétitive mais parce qu’il n’y avait aucune demande. D’autre part, nous rencontrons le maire de Valdeluz, une ville qui a été construite durant le boom spéculatif, mais qui a été ensuite abandonné avec l’arrivée de la crise, la plupart des plans d’urbanisme non pas été réalisés et un grand nombre de maisons sont vides. Une ville fantôme au sud de Madrid. Enfin, nous rencontrons la PAH, la Plate-forme des victimes du crédit de Madrid, qui fait face aux expulsions et aide les familles affectées à trouver une solution face à la pression imminente des banques et de la police pour que ces familles quittent leur domicile.

Et puis, nous découvrons Blanca, une immigrée équatorienne, mariée à un travailleur du bâtiment, elle a acheté un appartement dans le quartier ouvrier Carabanchel, au sud de Madrid. Après la crise, elle n’a pas réussi à payer son crédit. Son mari est parti et elle s’est mise à se battre, dans le cadre de la PAH, contre la banque pour empêcher l’expulsion de son logement et arrêter de payer ses dettes. La plateforme a profondément changé sa vie, en lui donnant les moyens de se battre, en lui redonnant sa dignité comme à des milliers de victimes des banques et des promoteurs.

Taxi Sofia Film de Stephan Komandarev (11 octobre 2017)

Diffusion de l’entretien avec Stephan Komandarev : 14 octobre

Le film de Stephan Komandarev reflète la réalité sociale de la Bulgarie actuelle, sans ellipse ni dramatisation… Une réalité sociale brute. Le drame en prologue du film est tiré d’un fait divers et c’est la trame du récit. Il ouvre en effet une investigation de la société bulgare tout au long d’une nuit, à travers des chauffeurs de taxis et leur clientèle. Chauffeur de taxi de nuit, c’est pour beaucoup la nécessité d’un double emploi pour survivre. C’est ainsi qu’on trouve là toutes les catégories de la société. Le constat fait par Stephan Komandarev dans Taxi Sofia est rude et sans concessions. C’est le fric qui règne dans la société bulgare, passée au capitalisme sauvage et, de manière concomitante, le désespoir et la corruption banalisée, et même instituée.

Le film est construit sur plusieurs épisodes qui, en quelque sorte, se passent le relais de manière très fluide. Le premier épisode, ou le prologue, se déroule au petit matin, lorsque Misho, chauffeur la nuit et petit entrepreneur dans la journée, apprend que, pour obtenir son prêt, le pot de vin a en fait doublé. Pris à la gorge, il tente de convaincre le banquier de lui allouer la somme afin de sauver in extremis son entreprise sur le point d’être saisie. Mais devant la morgue du banquier, Misho l’abat et se suicide.

Commence alors une balade nocturne dans différents taxis, avec en fond sonore la radio et les débats sur le drame du prologue. Cinq chauffeurs de taxi, dont une femme, et leurs passagers roulent dans Sofia, chacun et chacune espérant un avenir meilleur.

Taxi Sofia fait sans doute un constat désespéré de la société bulgare actuelle, en même temps, les personnages sont lucides ; certains et certaines quittent le pays, d’autres restent et n’ont pas abandonné leurs valeurs. On désespère du système certes, mais pas de l’humain.

Taxi Sofia est un grand film. Sur les écrans le 11 octobre.

39e CINEMED : Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier du 20 au 28 octobre 2017

avec en soirée d’ouverture, Razzia, le nouveau film de Nabil Ayouch.
Une réalisation qui suit deux films : Les Chevaux de Dieu et Much Loved.

En dehors des films proposés en compétition, en panorama, les longs et les courts métrages, les documentaires, les rétrospectives, les rencontres que nous évoquerons dans de prochaines émissions, il faut signaler en particulier un focus sur le cinéma algérien.

En effet depuis quelques années déjà, une nouvelle génération de cinéastes se distingue par des réalisations tout autant originales que puissantes. Un renouveau du cinéma algérien qui a donné l’envie au festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier de présenter un panel de films à ne pas manquer.

Côté fiction et longs métrages, on pourra voir entre autres Loubia hamra de la cinéaste Narimane Mari qui se situe à la fin de la guerre d’Algérie ; L’Oranais de Lyes Salem. Des documentaires : Dans ma tête un rond point de Hassen Ferhani, Atlal de Djamel Kerkar, ou encore Bla Cinima de Lamine Ammar-Khodja. Dans les courts et moyens métrages : le magnifique Kindil de Damien Ounouri qui mêle fantastique et tabou social ; Tarzan, Don Quichotte et nous de Hassen Ferhani ainsi que son autre film, Les baies d’Alger ; Mollement un samedi matin de Sofia Djama ; Je te promets de Mohamed Yargui ; Les jours d’avant de Karim Moussaoui, réalisateur du très beau film, présenté en avant-première pendant le festival, En attendant les hirondelles.

À ce focus sur le nouveau cinéma algérien, s’ajoute une rétrospective du cinéaste prolifique, Merzak Allouache, depuis Omar Gatlato (1976) jusqu’à Harragas, le Repenti, les Terrasses ou Enquête au paradis parmi un choix extrêmement dense de sa filmographie.

Le 39e CINEMED : Festival international du cinéma méditerranéen
C’est quelques 250 films du 20 au 28 octobre 2017
Pour la programmation dans son ensemble : http://www.cinemed.tm.fr/

Autre festival, à Paris cette fois :

Du 11 au 17 octobre aux cinémas Reflet Médicis et Arlequin : 5e Panorama du cinéma colombien

Treize longs métrages et quinze courts métrages qui font découvrir les différents courants de la création cinématographique colombienne, leur originalité et leur richesse. Le Panorama, c’est une semaine en compagnie de quatorze réalisateurs et 28 films à voir.

Nous avions parlé du cinéma colombien au printemps avec les rencontres Cinélatino de Toulouse, et notamment un entretien avec Catalina Villar pour son film, La nueva Medellin, sur la transformation urbanistique de la ville.

En ouverture du Panorama du cinéma colombien, le 11 octobre au cinéma Arlequin :
LOS NADIE (Les anonymes) de Juan Sebastián Mesa
Dans Los Nadie, Juan Sebastiàn Mesa fait le portrait de la jeunesse de Medellín. Cinq amis rêvent de voyager en Amérique du Sud et se préparent à une expérience qu’ils désirent pour rompre avec un quotidien qui leur apparaît comme monotone et étriqué. Avant leur départ, ils parcourent Medellín et font découvrir les arts de la rue, les graffitis, les tatouages et la musique punk. C’est la culture punk qui est au centre du film tourné en dix jours, en noir et blanc, avec un petit budget, exprimant avec force et spontanéité le besoin de liberté des personnages.

Le 5e Panorama du cinéma colombien du 11 au 17 octobre
à Paris et dans deux cinémas : le Reflet Médicis et l’Arlequin.
Pour les détails de la programmation : http://www.panoramaducinemacolombien.com/edition-2017