Chroniques rebelles
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Samedi 22 janvier 2022
Entretien avec Abdallah Al-Khatii à propos de Little Palestine. Irradiés de Rithy Panh. 22èmes Journées cinématographiques : Partie de campagne. Enquête sur un scandale d’État, entretien avec Thierry de Peretti. Les Promesses de Thomas Kruithof. L’Ennemi de Stephan Streker
Article mis en ligne le 23 janvier 2022
dernière modification le 31 janvier 2022

par CP

Little Palestine
Journal d’un siège

Entretien avec le réalisateur Abdallah Al-Khatib

Irradiés
Film documentaire de Rithy Panh (26 janvier 2022)

22e édition Journées cinématographiques
Du 1er au 12 février 2022
La thématique cette année : Partie de campagne

Enquête sur un scandale d’État
Entretien avec Thierry de Peretti

Les Promesses
Thomas Kruithof (26 janvier 2022)

L’Ennemi
Stephan Streker (26 janvier 2022)

Little Palestine
Journal d’un siège

Entretien avec le réalisateur Abdallah Al-Khatib

En compagnie de Zeina Toutounji
Little Palestine. Journal d’un siège de Abdallah Al Khatib est un témoignage de l’intérieur, qui décrit le quotidien dramatique des asségié.es, les réflexions, les faits sans toutefois rajouter à l’horreur présente sur les images. C’est avec pudeur que la caméra saisit le regard d’un vieil homme épuisé, celui des malades, des femmes cherchant désespérément un reste de nourriture dans les détritus…

Dans ce chaos immobile qui semble sans fin, les enfants résistent. Le film est également un hommage à la solidarité, au courage de nombreuses personnes, et aux enfants impressionnants par leur maturité face à la situation.
Lors de notre rencontre avec Abdallah, la première question a concerné sa relation à la caméra dans cette situation extrême, autrement dit : que signifiait “filmer” dans une situation de survie ?

©Cinemed
L’importance de Little Palestine est non seulement le document et le témoignage exceptionnel qu’il représente, mais c’est aussi un grand film de cinéma.
L’entretien avec Abdallah Al-Khatib est aujourd’hui diffusé dans son intégralité dans une traduction de Zeina Toutounji.

Illustrations musicales : Trio Joubran, Carry the Earth, The Long March, Roubama. Odeh Turjman, Music of an Ordinary Day.

Irradiés
Film documentaire de Rithy Panh (26 janvier 2022)

On pourrait ajouter à son titre ces paroles de la voix off qui accompagne les images du film : « Regarde encore, une fois, cent fois »
« La vie d’un survivant est quelque chose d’indicible. Mais il faut vivre et aborder cette irradiation dont on ne trouvera peut-être jamais la cause ni les propriétés, et dont on ne pourra peut-être pas se protéger. Mais pour le bien de l’humanité, il est nécessaire de faire l’expérience de toutes les formes de mal et de les comprendre – des tranchées aux atolls, des camps au silence.
Le mal irradie. Il blesse indéfiniment jusqu’aux générations suivantes. Mais au-delà, il y a l’innocence.
Parfois, la nuit, dans le silence et l’immensité de la pénombre, je ressens une vague d’angoisse monter en moi, qui s’enroule autour de moi et me submerge.
Je lutte, en tentant de reprendre ma respiration et de remonter à la surface, mais si j’ai échappé à la noyade, la pierre noire de la mélancolie se cristallise au plus profond de moi, aussi lourde que le chagrin. Affronter l’innommable est comme un cri. Mais tout n’est pas compréhensible
. »

Dès le début du film, on est happé par les images où le déni n’a plus sa place. En trois écrans se déversent, en une suite ininterrompue de destructions, de blessures, la guerre et les massacres, les défilés d‘êtres humains fuyant et pris comme cibles sous les bombes. : des visages, des mains, des animaux, images fugitives et brutales avec en voix off : « Regarde encore, une fois, cent fois » les corps anéantis.
Quoi de plus révoltant et de plus puissant dans l’horreur que les images de mort, des exodes… Deux voix qui se répondent et parlent de la mort, de l’anéantissement. Les monceaux de cadavres, les ruines, la vie éradiquée, les corps, les vêtements entassés, les photos éparpillées… L’irradiation de la bombe ponctue les images tout au long du film, comme l’ultime barbarie.
Les camps de la mort, les barbelés, les registres nazis, le cynisme, l’obscénité de « Arbeit macht frei », les fours crématoires et les êtres qui comptent les jours dans les camps, images qui s’enchaînent avec les outils de mort, le napalm, les bombes incendiaires, les gaz mortels…
« L’abstraction ouvre sur la mort  », le nucléaire naît d’une idée élaborée dans les laboratoires et se transforme en outil de mort foudroyant à très grande échelle.Tout au long de ce réquisitoire contre la guerre et ses conséquences, est omniprésente la destruction nucléaire et la mort inéluctable qu’elle entraîne même après l’arrêt de la guerre.

Le film revient aussi sur la propagande mortifère, les enjeux politiques et commerciaux. Le nazisme a introduit la déshumanisation des êtres humains pour mieux entraîner un peuple dans la destruction industrielle mise en place dès le texte d’Hitler, Mein Kampf, pour l’embrigadement de toute une population. Les pratiques ? La peur insatiable, les travaux forcés avec, en témoins des milliers de portraits d’êtres humains, fichés, torturés, tués, disparus au Cambodge sous le régime des Khmers rouges.
Les trois écrans réapparaissent, s’effacent, multiplient la même image ou donnent à voir trois images en écho, peu importe si le lieu ou la chronologie diffèrent.

Celui qui obéit aux ordres, le pilote qui largue les bombes, sur des villes, des villages, donc sur des civils, il ne voit pas… Il se réjouit même d’atteindre un objectif, la bombe explose à 500 mètre au-dessus d’un hôpital, sans laisser aucune chance aux civils. Les images se superposent comme des notes de mort provenant de multiples guerres, de multiples meurtres, de multiples souffrances… Combien de morts à Hiroshima ? Et après la pluie noire, la douleur, les corps brûlés, sans peau comme écorchés. Et à Nagazaki ? C’est aussi la mort scientifique. Et soudain, l’on découvre l’immensité du désastre, la ville détruite.
Sur une stèle du Mémorial d’Hiroshima, on peut lire ce poème de Tôge Sankichi : Rendez le père
rendez la mère
rendez les vieux
rendez les enfants
rendez moi-même
et ceux qui me sont liés
les humains rendez-les
tant qu’il existe des humains
un monde des humains

la paix qui ne puisse se détruire rendez-là

« J’ai eu l’idée d’un film sur la bombe (atomique) [écrit Rithy Panh ] sur la bombe et l’anéantissement.
Avons-nous pris la mesure de la folie destructrice du XXème siècle ? Pas vraiment. Qu’avons-nous retenu de notre capacité à nous autodétruire ? Presque rien.
 »
Alors « Regarde encore, une fois, cent fois »
Irradiés de Rithy Panh, le 26 janvier au cinéma

22e édition Journées cinématographiques
Du 1er au 12 février 2022
La thématique cette année : Partie de campagne

22èmes Journées cinématographiques au Cinéma l’Écran, Saint-Denis
Site : www.journeescinematographiques.fr

Deux mois en amont des élections présidentielles, les 22es Journées cinématographiques reviennent avec la thématique Partie de campagne afin d’observer la mise en scène du politique au cinéma. Plus de 50 films sont présentés, ce sera des projections, des rencontres dans quatre cinémas de la Seine-Saint-Denis : le Studio à Aubervilliers, L’Étoile à La Courneuve, l’Espace 1789, à Saint-Ouen et bien sûr au Cinéma l’Écran, Saint-Denis qui est à l’initiative de ces Journées cinématographiques.
« Tout est politique » et les Journées explorent à chaque édition une thématique sociale et politique à travers le prisme du cinéma, sont présentés tant de grands classiques que des films inédits… Les œuvres retenues témoignent toujours d’un état du monde.

Qu’en est-il des politiques, ces hommes et ces femmes dont le rôle est, au quotidien, de participer à l’organisation et au développement de la société ? Ceux et celles qui, à travers diverses organisations au fonctionnement souvent opaque, influent sur la sphère publique et participent pleinement à l’élaboration d’une démocratie en perpétuelle gestation et gesticulation. Que capte le cinéma dès lors qu’il s’empare concrètement du monde politique pour en exposer ses processus complexes ?

Thierry de Peretti est l’invité d’honneur des Journées et présentera son film, Enquête sur un scandale d’État, qui sort le 9 février.
Encore des avant–premières : Rien à foutre d’Emmanuel Marre et Julie Lecoustre, Un peuple d’Emmanuel Gras, La Campagne de France de Sylvain Desclous, La disparition ? de Jean-Pierre Pozzi …
Alice et le maire de Nicolas Pariser
Nous le peuple de Claudine Bories et Patrice Chagnard
Nous trois ou rien de Kheiron
J’ai pas changé de bord de Christian Blanchet
A Night of Knowing Nothing de Payal Kapadia 

En route pour le milliard de Dieudo Hamadi 
que nous avons présenté et défendu aux chroniques rebelles de Radio Libertaire.
Fritzi, histoire d’une révolution de Matthias Bruhn et Ralf Kukula

Things We Do Not Say de Ali Razi
Salvador Allende de Patricio Guzmán
Mexique
1974, une partie de campagne de Raymond Depardon
La vie est à nous de Jean Renoir
The Kamagaski Cauldron War de Leo Satō
Le Caïman de Nanni Moretti
Sarraounia de Med Hondo
Yama – Coup pour coup de Satō Mitsuo et Yamaoka Kyōichi
Nothing But a Man de Michael Roemer
Tempête à Washington de Otto Preminger
Monsieur Smith au Sénat de Frank Capra
Vers sa destinée (Young Mister Lincoln) de John Ford
Thierry de Peretti a également choisi, pour sa carte blanche, de montrer trois films de Francesco Rosi.
Depuis sa première édition, les Journées cinématographiques abordent chaque année un nouveau thème et s’attachent à interroger différentes problématiques contemporaines de notre société en puisant dans les classiques ou inédits de l’histoire du cinéma tout en restant à l’affût des films les plus récents et emblématiques. Chaque séance est accompagnée de rencontres en présence de cinéastes, de critiques ou de membres de la société civile.
Site des 22èmes Journées cinématographiques : www.journeescinematographiques.fr

Enquête sur un scandale d’État
Entretien avec Thierry de Peretti réalisé au CINEMED en octobre 2021.

Et pour rester dans la mouvance de Partie de campagne des 22èmes Journées cinématographiques, deux films qui seront sur les écrans le 26 janvier :
Les Promesses de Thomas Kruithof
Et L’Ennemi de Stephan Streker

Les Promesses
Thomas Kruithof (26 janvier 2022)

Les Promesses de Thomas Kruithof nous plonge dans la préparation d’une campagne et les deals qui la sou tendent. Claire est maire dans la banlieue parisienne, le 93, et se bat pour sauver le quartier des Bernardins, une cité où règnent les marchands de sommeil et l’insalubrité. Elle est issue d’un milieu bourgeois et a auprès d’elle, Yazid, un directeur de cabinet efficace, qui a vécu dans ce quartier populaire. Il connaît tout le monde et est partie prenante dans la lutte de la maire, tout en visant à terme de s’émanciper du 93 vers de hautes sphères politiques. Arrive le deal, on offre à Clémence un poste dans un ministère et elle se trouve devant le choix de continuer à défendre le quartier, qu’elle considère comme sa lutte ultime, avant de passer le flambeau à une jeune femme formée par elle, ou bien abandonner ses « promesses » et se consacrer à la perspective d’un poste ministériel. Tout cela dans un contexte de prochaines élections.

Alors un dernier combat et une fidélité à ses « promesses » ou un piédestal pour une ambition, qui en quelque sorte consacrerait sa carrière politique et comblerait le vide qu’elle craint dans sa vie ? De son côté, Yazid est également approché par un homme politique pour un poste plus prestigieux. Le duo est mis au pied du mur : choisir entre l’ambition, l’opportunisme de carrière, et la fidélité aux engagements.

Les Promesses est définitivement un film sur la politique mais, comme le précise le réalisateur, on y « parle plus d’argent que d’idées... […] Et au-delà des mots, quelque chose se déploie, qui a à voir avec l’intime des personnages, leur volonté, leur colère, leurs doutes. » La routine politique quoi !
À noter l’interprétation excellente de Reda Kateb dans le rôle de Yazid…

L’Ennemi
Stephan Streker (26 janvier 2022)

L’Ennemi de Stephan Streker met en scène un homme politique en vue, Louis Durieux, accusé d’avoir tué son épouse, Maeva, retrouvée morte dans leur chambre d’hôtel après une scène de rupture. Il se défend d’avoir désiré nuire à son épouse qu’il aime, mais en même temps n’est guère convaincant. Une étrange histoire qui présente « des événements qui ont peut-être eu lieu tels que montrés ou qui ont peut-être été modifiés, volontairement ou involontairement, par le souvenir que certains personnages en ont. »
Inspiré de faits réels, le film joue sur cette ambiguïté qui nourrit l’intrigue et sollicite le public sur la réalité des faits. L’homme est-il coupable ou pris au piège d’un concours de faits qui l’accablent. « À mes yeux [explique le réalisateur], faire du cinéma, c’est capter une vérité par le mensonge. Au cinéma, on passe par le mensonge – tout à fait assumé – pour proposer un regard, un point de vue et libérer une forme de vérité... mais qui est détachée des faits. J’aime beaucoup m’inspirer de faits réels, car je pense justement que le plus important au cinéma, c’est le point de vue, la vision, la représentation artistique, le “comment”. Dix cinéastes qui seraient inspirés par le même événement réel en feraient dix longs métrages très différents et spécifiques. C’est justement cette spécificité qui est intéressante. »

Coupable ou innocent ? Toute la trame du récit est traversée par cette question qui n’a aucune réponse, et même le principal protagoniste l’ignore lui-même. Finalement « la vérité est un concept absolu et, pourtant, quand il s’agit d’événements humains, de sentiments, tout est plus compliqué, plus articulé et peut-être même plus relatif. Mais [précise Stephan Streker] le film ne parle pas que de ça. Il s’agit d’une histoire très riche qui me permet d’aborder beaucoup de thèmes qui me passionnent. L’Ennemi est un film qui parle de la vérité, de l’intime conviction, de la culpabilité, de la responsabilité ou de la justice mais, en plus, c’est une grande histoire d’amour. Et c’est aussi un film qui me permet de m’intéresser à l’intime, ce qui me passionne. »
« Un jour tu verras, on se rencontrera »… Une chanson qui accompagne parfaitement le film.
Les Promesses de Thomas Kruithof Et L’Ennemi de Stephan Streker sur les écrans le 26 janvier.


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