Chroniques rebelles
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Samedi 6 novembre 2004
Le droit à la mort. Suicide mode d’emploi.
Claude Guillon (Hors commerce)
Article mis en ligne le 10 février 2008
dernière modification le 6 mars 2009

par CP

« Je me suiciderais parce que je suis libre. Et je ne considère pas la Liberté comme un vain mot ; je l’étends au contraire jusqu’au droit de m’ôter la vie si je la prévois à jamais malheureuse. […] Vous qui me condamnez pour avoir porté la main sur mon corps, pensez-vous qu’avant de me décider, je n’ai pas bien combattu, bien souffert ? » Ernest Cœurderoy, Jours d’exil , 1855.
Toute la question est là !
En bonus, le fait de ne pas être blâmable d’avoir choisi sa mort parce qu’il y a eu combat et souffrance ! La notion d’une quelconque rédemption par la souffrance est absolument odieuse et il est impossible de ne pas y voir,
encore une fois, la patte de la religion.

Pourquoi combattre ou souffrir pour être exemptée de blâme concernant une décision on ne peut plus personnelle ? Décider de mettre fin à son existence, c’est comme décider d’avoir ou non un enfant.
« C’est mon corps et c’est moi qui décide » répètent les féministes et les femmes en général. Car, même si la décision n’est évidemment pas simple et que, pour chaque personne, l’analyse est différente, on peut penser que la réflexion et la conscience d’un acte est à la base de la décision.
Doit-on, dans ce cas, revendiquer le droit à la mort sans cautionner l’autorité qui impose ses règles ? Je ne le pense pas. Devoir justifier un acte qui concerne sa propre existence est insupportable et d’ailleurs, depuis quand les institutions seraient-elles autrement qu’inhumaines ? Ne sont-elles pas souvent garant de l’indifférence entre les êtres et du manque de solidarité ?

« Nul n’a le droit d’attenter à sa vie ; que Dieu seul, qui en est l’auteur, doit en disposer. Et, comme le suicidé est coupable d’une double offense, l’une spirituelle, en usurpant la prérogative du Tout-puissant, […] l’autre temporelle, commise envers le roi, qui a intérêt à la conservation de tous ses sujets ; la loi a en conséquence rangé ce crime parmi les plus graves ; elle en fait une espèce particulière de félonie, une félonie commise contre soi-même. »

Intéressant de voir jusqu’où peut aller la loi — dans l’Angleterre de 1769 — pour le contrôle du corps et de la pensée. Autre version de l’interdit, plus récente cette fois — en 1952 —, plus jésuite et emblématique d’une même volonté de contrôle des êtres :

« Le suicide, et sa tentative, ne constitue pas une infraction, un crime, mais on n’a pas le droit de le commettre. La raison en est que ce serait un abus du droit d’existence. Le suicide n’est pas de cette façon un des Droits [de la personne]. »
Chercher l’erreur… Alors, puisque le suicide, la mort volontaire est un sujet tabou, raison de plus d’en parler dans les Chroniques rebelles.