Chroniques rebelles
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Samedi 30 septembre 2008
De Munich à Vichy. L’assassinat de la 3e République, 1938-1940
d’Annie Lacroix-Riz (Armand Colin).
Article mis en ligne le 30 août 2008
dernière modification le 19 octobre 2008

par ps

« Depuis le début des années 1930, les plans de destruction d’une République jugée par ses institutions trop attentive aux revendications populaires avaient été activement conduits par le noyau dirigeant de l’économie française. À son sommet s’était organisé un groupe de quelques dizaines de personnes représentant la haute banque (Worms, Lehideux, groupe de Nervo, Banque d’Indochine) et l’industrie lourde (Comité des Forges et des Houillières). »
Annie Lacroix-Riz, De Munich à Vichy. L’assassinat de la Troisième République 1938-1940.

Les années 1930 sont des années importantes et graves dans l’histoire de l’Europe qui, si elles sont des années de luttes intenses et d’espoir, sont aussi les années du fascisme qui ont débouché sur un second conflit mondial et des génocides programmés.

De Munich à Vichy. L’assassinat de la Troisième République 1938-1940 , nouveau livre d’Annie Lacroix-Riz, poursuit la recherche d’une réalité occultée pendant des décennies, et toujours dérangeante. C’est une pièce supplémentaire au dossier qu’elle a ouvert sur une période trouble de l’histoire européenne.

Après Le Vatican, l’Europe et le Reich, après Industriels et banquiers sous l’Occupation et, enfin, le Choix de la défaite, De Munich à Vichy. L’assassinat de la Troisième République 1938-1940 permet de comprendre les véritables enjeux dissimulés derrière les conflits et les guerres, et cela génère une perspective bien différente pour décrypter les sources officielles d’information et de propagande.

Les archives s’ouvrent et beaucoup des mythes de l’histoire officielle s’écroulent.

Ce point est d’autant plus important si l’on considère les accointances déclarées et les relations entre le gouvernement et le patronat aujourd’hui.
« Dans les années 1930 de la crise, comme “en 1793, 1830, 1848 ou 1871”, la grande bourgeoisie pouvait compter sur les hommes politiques placés par elle-même à la tête des cabinets, malgré les apparences parlementaires. »
Mais est-ce si différent aujourd’hui ?

On peut déplorer que malgré «  l’abondance des sources […] en histoire, la “timidité” a élargi les « zones d’ombre et [les] trous noirs au fil de l’ouverture des fonds. Sept décennies après Munich, presque autant après la débâcle de la France, l’historiographie dominante ne s’intéresse pas aux responsabilités des élites de l’argent et de leurs délégués divers qui a ôté à la France son statut de “grande puissance” et fait perdre à ses ouvriers et employés la moitié de leur salaire réel et une dizaine de kilos entre les étés 1940 et 1944. »

En effet, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, qu’avons-nous appris de l’Occupation et de la Collaboration avec les régimes fascistes ? Que savons-nous de la Cagoule — ce mouvement fasciste fondé dans les années 1930 —, des personnes qui y ont adhéré, des ligues d’extrême droite ? Quels ont été les liens entre la Cagoule, les Croix de feu et le pouvoir d’alors ? L’unification des groupes fascistes et de droite s’est-elle opéré ?

« On a beaucoup parlé de la Cagoule, et on n’en a jamais dit grand’ chose. Avant guerre, les journaux relatèrent certains crimes, certains attentats, mais ne lièrent point en général ces crimes ni ces attentats à leur cause directe. […] La Cagoule n’était rien d’autre qu’un complot fasciste visant à renverser la République et à la remplacer par un régime autoritaire. […] Les Cagoulards furent les agents les plus actifs de Franco, de Mussolini et de Hitler en France. La Cagoule avait pénétré tous les milieux. Ses hommes infestaient les ministères, ils noyautaient les états-majors. La Cagoule était subventionnée par les banques, la haute finance, les trusts, qui voyaient en elle un moyen de domination future. » Et elle sera au pouvoir avec Pétain en 1940. Joseph Désert, 1946, Toute la vérité sur l’Affaire de la Cagoule.

Autres questions : quelle version donne l’histoire officielle de la vague d’Épuration qui, après la Seconde Guerre mondiale, a enterré discrètement des dossiers brûlants — sauf pour quelques responsables — et effacé certains noms de personnes impliquées dans ces groupes de droite et fascistes ? Existe-t-il des rémanences de ces tendances ? Autrement dit, qui sont aujourd’hui les héritiers de cette mouvance fasciste ?

De Munich à Vichy. L’assassinat de la Troisième République 1938-1940 se lit comme une enquête. Une enquête qui pose immanquablement des questions sur les liens actuels entre politique et capital.
La guerre contre le salaire, des politiques qui prônent l’austérité, cela ne vous rappelle rien ?

Connaître les liens entre le pouvoir politique et le patronat est l’un des intérêts majeurs de la recherche d’Annie Lacroix-Riz. Or, écrit-elle : «  La puissance des intérêts matériels […] conduisent les classes dirigeantes à préférer les pires aventuriers au partage plus juste des richesses. [et] Si les historiens recommençaient ici à soumettre les puissants à examen scientifique, le public comprendrait mieux que le “haut patronat” français ait haï une république pourtant si “bonne fille” ».

Il faut aussi souligner que les « hauts responsables » de l’époque des années 1930 et 1940 ont continué d’exercer des influences sur les gouvernements. Le capitalisme se recycle, change de décor, mais les buts sont les mêmes : le profit pour une minorité au détriment des populations et la domination de celles-ci. La mondialisation, la globalisation du capital n’est pas quelque chose de nouveau, cela existe depuis longtemps.

(Photos DR, prêtées par les éditions Armand Colin : Chars allemands/Arrestations/Vu/Casques abandonnés)