Chroniques rebelles
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Gaza Strophe. Le jour d’après… Film documentaire de Samir Abdellah et Khéridine Mabrouk
Christiane Passevant
Article mis en ligne le 23 décembre 2011

par CP

Gaza-strophe, le jour d’après — réalisé par Samir Abdallah et Kheridine Mabrouk — a été diffusé le mercredi 10 février 2011 sur France Ô, chaîne du groupe France Télévisions. Le film devait être diffusé initialement sur France 4, mais le CRIF a fait pression sur la chaîne pour faire annuler sa diffusion. Diverses manifestations hostiles ont également eu lieu contre les salles de cinéma qui projetaient le film. Le film de Samir Abdallah et de Kheiredine Mabrouk livrent des images crues et parfois insoutenables de la tragédie vécue par la population de Gaza pendant les trois semaines de bombardements qui n’ont épargné ni les femmes, ni les vieillards, ni les enfants, ni les malades. « Un million de kilos d’explosifs sur le territoire le plus exangue du monde ! Tout Gaza c’est 350 km2 ! De barbelé à barbelé : 350 km2 ! » commente un habitant de Gaza.

Le documentaire, qui relate le quotidien des Gazaouis après l’opération « Plomb durci » de décembre 2008-janvier 2009, montre la barbarie perpétrée à grande échelle contre la population civile palestinienne : destructions de maisons, arbres arrachés et champs labourés par les tanks, bombes au phosphore lancées sur des écoles, enfants pris pour cible et parents tués devant les enfants, orphelins, très nombreux blessés, handicapés à vie. Le bilan humain est très lourd : 1400 morts du côté palestinien, pour la plupart des civils, et 13 côté soldats israéliens. Et est difficile à mesurer sur le plan environnemental« Encore une ou deux opérations comme celle-ci et il ne restera plus de Palestiniens ! » s’écrie l’un des témoins du film.

L’ONU, qui n’a guère réagi durant les bombardements, a finalement cédé aux pressions et désigné une mission pour l’établissement des faits à Gaza. Le rapport Goldstone, présenté devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, à Genève, le 29 septembre 2009, précise que « la mission conclut que le comportement des forces armées israéliennes constitue une grave violation de la quatrième Convention de Genève concernant les meurtres délibérés et la volonté de causer de grandes souffrances à des personnes protégées ». Mais les conclusions du rapport sur l’offensive de l’armée israélienne sur Gaza ont été mises en cause par son auteur, le juge Goldstone, qui a ensuite déclaré qu’« on ne peut plus dire qu’Israël est responsable de crime de guerre. » et qu’il devait « reconsidérer » ses conclusions à la lumière des éléments d’enquêtes publiés par Israël. Ce revirement délivre en quelque sorte un droit de tuer la population de Gaza, considérée dans les discours de propagande et dans son ensemble comme terroriste.

Cette pratique du « blaming the victim » et le fait de renvoyer dos à dos la population palestinienne civile et l’armée israélienne — l’une des plus puissantes et des mieux formées au monde — est une illustration du deux poids deux mesures qui préside au traitement de l’information dans la région. On peut effectivement se demander pourquoi la « communauté internationale », si prompte à intervenir en Lybie pour protéger la population civile, ne fait rien en Palestine, malgré la litanie des résolutions de l’ONU depuis 63 ans.

Dans le film, les témoignages sont bouleversants, les questions sont
lancinantes : pourquoi cette punition collective exercée à l’encontre des civils ? Pourquoi la souffrance des enfants ? Pourquoi ces
destructions ? Pour faire partir les gens ?
« Nous resterons sur notre terre jusqu’à la dernière goutte de sang. Nous resterons là. Où aller ? On est accepté nulle part. Où aller ? C’est notre terre. Elle le restera toujours, même s’ils nous tuent et nous détruisent !
L’État d’Israël a pillé nos terres et nous a dépossédés de nos biens et de
nous-mêmes ! Il nous a tout pris. »

« Des images apocalyptiques et, au milieu des décombres, des hommes, des femmes, des enfants dignes dans leur douleur et leurs souffrances, criant leur impuissance face à l’injustice et à l’arbitraire imposés par un ennemi surarmé et tout puissant qui les tient sous le contrôle de sa suprématie technologique, à l’exemple de ce ballon dans le ciel contenant un radar qui surveille tout Gaza. » D’ailleurs, après l’opération militaire israélienne « plomb durci », le cessez-le-feu n’a jamais vraiment été établi, les tirs et les bombardements continuent de tuer des civils à Gaza… Et demeure toujours la crainte d’une attaque de la Bande de Gaza d’ampleur similaire à celle de 2008-2009.

Gaza-strophe. Le jour d’après de Samir Abdallah et Kheiridine Mabrouk est document essentiel pour comprendre une situation très souvent instrumentalisée à des fins politiques. Le film témoigne de « la politique délibérée et systématique des forces armées israéliennes de cibler des sites industriels et des installations d’eau » aux mêmes conclusions que la mission : les stratèges militaires ont suivi délibérément une doctrine impliquant
« l’usage d’une force disproportionnée et suscitant de gros dégâts et des destructions de biens et d’infrastructures civiles et des souffrances chez les populations civiles ».

Gaza est une prison à ciel ouvert où se trouve parquée toute une population, sur une bande étroite de quelques dizaines de kilomètres carrés. La situation des agriculteurs palestiniens, proches de la zone frontalière, est encore pire puisqu’ils ne peuvent pas cultiver leurs terres sous peine d’être mitraillés par l’armée. Face à cette violence subie, la population palestinienne tente de survivre et garde sa dignité. Mais le regard des enfants y est terrible et leurs dessins en racontent encore plus sur le drame de la Palestine.


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