Chroniques rebelles
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Avignon 2012
Avignon 2012. Retour de festival
Samedi 21 juillet 2012
Article mis en ligne le 23 juillet 2012
dernière modification le 31 mai 2013

par CP

Louise Michel Écrits et cris

Spectacle de théâtre musical d’après les Mémoires et la correspondance de Louise Michel.

Adaptation et mise en scène Marie Ruggeri

Illustration musicale Christian Belhomme

Avec Marie Ruggeri et Christian Belhomme

La papesse Américaine

de Esther Vilar

Robert Poudérou (adaptation)

mise en scène Thierry Harcourt

À toi pour toujours, ta Marie-Lou

de Michel Tremblay

mise en scène Christian Bordeleau

Avec Yves Collignon, Cécile Magnet, Marie Mainchin, Sophie Parel

Avignon. Le Festival, c’est une foire, une grande foire au théâtre avec démonstrations et happenings dans toute la ville, car les artistes tractent, tractent pour attirer le public, attirer l’attention des théâtres, des producteurs… « Je déteste ça ! [me confie une comédienne] Mais c’est Avignon et c’est le jeu. »

En dehors des spectacles du In — réservés très longtemps à l’avance — et du Off — cette année il n’y a pas moins de 1296 spectacles ! Oui, vous avez bien entendu : 1296 spectacles. À se demander si toutes les salles et les espaces ont du public —, en dehors donc du In et du Off, il y a les expositions, les émissions en direct et en public, les conférences sur le théâtre, l’art ou le statut d’intermittent-es, les débats et bien sûr les spectacles de rue. Danses, musiques, toute forme d’expression… Comme si tous et toutes s’étaient donné rendez-vous à Avignon, cette ancienne ville des papes où chaque coin de rue abrite un vestige religieux, une vierge, une pieta…

Juillet en Avignon, c’est une ville entière dédiée au spectacle vivant… Mais voilà, que et comment choisir ?

Anna Perez, jeune danseuse de Flamenco

Au hasard des balades, des rencontres et des tracts distribués, les surprises se transforment parfois en découvertes ravies. À une condition, prendre le temps, le mieux étant de se plonger dans l’énorme book du Off en se munissant d’une carte, car la ville peut paraître un labyrinthe, et de se procurer au cloître Saint Louis (je vous l’ai dit la religion est partout !) une présentation du festival et un dépliant illustrés par un artiste sud-africain génial, William Kentridge.

Cet artiste complet, on peut le découvrir dans une exposition à la Chapelle du Miracle, mais aussi espérer que son spectacle, Refuse the Hour (la Négation du temps), sera repris par une salle parisienne ou partira en tournée en France. Spectacle total, chants, danses, installations sculptées, projections vidéos, cinéma… Mais aussi philosophie, mathématiques, chorégraphie sur les mots et les sons, le spectacle — la Négation du temps — coule comme une longue narration antique, avec un coryphée et un parcours sonore à couper le souffle. L’exposition montre un aspect du travail, de William Kentridge, l’entrée est libre et c’est à voir absolument.

Autre exposition, celle-ci à l’école d’art (entrée libre également), de Simon McBurney / Complicite dont la mise en scène du Maître et Marguerite d’après Mikhaïl Boulgakov a ouvert le festival de 2012, le 66ème. Trois salles pour entrer dans l’univers de McBurney et Complicite : « inspiration »,
« transformation », « création ». De cette compagnie,
John Berger écrit :
« Les membres de Complicite sont des contrebandiers qui ignorent les frontières, ou du moins qui les franchissent sans documents officiels […]. Ce théâtre fait clandestinement entrer le public dans des régions qui lui sont normalement inaccessibles. »

Alors que Refuse the Hour (la Négation du temps) de William Kentridge rebondit, depuis l’histoire de Persée et de la Gorgone, sur l’espace temps et mêle mythes, réalité, rêves, cauchemars et regard critique sur l’ère coloniale, Simon McBurney s’approprie le roman fascinant de Mikhaïl Boulgakov, le Maître et Marguerite, pour en livrer une vision proche de l’univers fantasmatique et vitriolé de l’auteur russe, un conte fantastique doublé d’une critique politique et sociale.

On pense au Procès de Franz Kafka, dans la mise en scène, au cinéma, d’Orson Welles, ou au Faust d’Alexander Sokourov, sorti récemment sur les écrans. McBurney utilise les projections vidéo pour faire entrer le public dans le monde halluciné de Boulgakov. Mise en scène grandiose et vision métaphorique d’un monde sous dictature. « Le monde dans lequel nous vivons est une fiction élaborée, une construction imaginaire que nous prenons pour la réalité. Sans doute est-ce la fonction de l’art que de percer cette vérité. » Conte philosophique, lutte pour la liberté, histoire d’amour, le Maître et Marguerite sera repris à Barcelone en septembre et à la Maison de la culture de Bobigny en février 2013.

Autre spectacle du In, Six personnages en quête d’auteur, d’après Luigi Pirandello (donné au Cloître des Carmes), dans une adaptation, une scénographie et une mise en scène de Stéphane Braunschweig. Le « théâtre dans le théâtre », ou encore : où se situe la réalité ? Cette adaptation redonne à la pièce toute sa force, sa modernité, je devrais plutôt dire son intemporalité, son universalité. Où se situe la réalité ? Dans la vie, dans sa représentation, dans un no Mans Land de la mémoire et de la sublimation ? La mise en scène utilise les images filmées pour passer derrière le décor, pour passer derrière une réalité construite. L’illusion de la réalité ou la réalité de l’illusion ? On ne sait plus la place de la mémoire sublimée ni le rapport aux personnages qu’entretient l’auteur et le metteur en scène. La réponse est-elle dans la chute ? Et d’ailleurs qui le sait ?

Les comédiens et les comédiennes sont remarquables et la pièce se transforme peu à peu, grâce au jeu et à la mise en scène, en un thriller haletant. Six personnages en quête d’auteur, d’après Luigi Pirandello dans la mise en scène de Stéphane Braunschweig sera donné au théâtre de la Colline à la rentrée.

Jérusalem Plomb durci. Un voyage halluciné dans une dictature émotionnelle de Winter Family. « En 2009 et 2010, Ruth Rosenthal et Xavier Klaine ont enregistré des sons, filmé et récolté des images des cérémonies et des célébrations mémorielles et nationales dans les écoles, les quartiers, les médias et un grand nombre de lieux symboliques de l’État d’Israël. » Cela donne une plongée violente dans un nationalisme ghettoïsé, militarisé, aveugle.

Mené par Ruth Rosenthal, ce voyage dans l’idéologie sioniste et le bourrage de crâne est sans équivoque quant à la parole de l’occupant et au nationalisme exacerbé. Ruth Rosenthal, de sa voix forte, situe les extraits sonores ou de films, affiche la parade militaire, participe à la commémoration de Jérusalem, ville annexée en 1967, proclamée territoire israélien, et habille la scène de drapeaux bleus et blancs.

L’évocation est ponctuée par une voix rappelant les nombreuses résolutions de l’ONU — dont la fameuse résolution 242 — restées lettres mortes.
Critique vive de l’occupation militaire, des mythes sur lesquels l’État d’Israël s’est construit, de la mémoire qui veut ignorer l’autre ou choisit de le démoniser. Seule sur scène, Ruth Rosenthal est impressionnante, déterminée dans son propos, notamment quand elle cite, en litanie, les différentes opérations militaires israéliennes contre la Palestine, contre le Liban… Pluie d’été… Plomb durci… C’est jusqu’au 28 juillet à Avignon où Winter Family donne également des concerts. À suivre…

Winter Family sera à Paris du 10 au 16 octobre 2012, au Centquatre.

Very Wetr ! Chorégraphie par Régine Chopinot (cloître des Célestins). Spectacle de danse aux intentions louables de respect d’une autre culture, celle des Canaques, mais malgré des costumes très in de Jean-Paul Gauthier et le propos anticolonial de base, le spectacle a du mal à emporter une adhésion complète. Régine Chopinot est une grande artiste, mais peut-être faut-il que spectacle se rôde…

Christophe Honoré

Nouveau roman. La pièce de Christophe Honoré qui dure trois quarante et met en scène les auteur-es autour de leur éditeur, Jérôme Lindon des éditions de Minuit : Nathalie Sarraute, Michel Butor, Alain Robbe-Grillet, Marguerite Duras, Claude Mauriac, Claude Simon, Claude Ollier… La pièce sera reprise dans plusieurs théâtres en France et notamment à Créteil et au théâtre de la Colline.

Et maintenant le Festival Off avec, tout d’abord :

Louise Michel Écrits et cris

Spectacle de théâtre musical d’après les Mémoires et la correspondance de Louise Michel.

Adaptation et mise en scène de Marie Ruggeri

Illustration musicale de Christian Belhomme

Interprété par Marie Ruggeri et Christian Belhomme

Deux entretiens, le premier avec Christian Belhomme qui nous offre trois illustrations musicales de Louise Michel Écrits et cris, puis avec Marie Ruggeri, littéralement habitée par « La Louise » comme elle le dit.

Louise Michel Écrits et cris

C’est durant tout le festival au théâtre de l’Essaïon, à 15h30
Jusqu’au 28 juillet

Une jolie rencontre, fortuite, dans la rue avec Nathalie Mann, avant d’aller voir son spectacle.

Elle joue

La papesse Américaine

Pamphlet d’Esther Vilar

Dans une adaptation de Robert Poudérou

Et une mise en scène de Thierry Harcourt

En 2040, il reste seulement 20 millions de catholiques, et ils élisent à la tête de l’Eglise un pape bien singulier : une femme ! Elle prononce alors à la télé son homélie d’intronisation.

Et c’est durant tout le festival au théâtre des Trois soleils, à 20h
Jusqu’au 28 juillet

Troisième spectacle, et pour moi une découverte, le théâtre québécois de Michel Tremblay avec sa pièce :

À toi pour toujours, ta Marie-Lou

mise en scène de Christian Bordeleau

Dix ans après la mort de leurs parents, deux sœurs, Carmen et Manon se retrouvent dans la cuisine familiale. Parallèlement, Marie-Lou et Léopold, leurs parents, revivent leur dernier samedi matin.

Entretiens avec Cécile Magnet (interprète de Marie-Lou, la mère), Christian Bordeleau (le metteur en scène), Sophie Parel (l’une des sœurs, Carmen, qui déborde de vitalité), Marie Mainchin (la seconde sœur, Manon) et enfin Yves Collignon (Léopold, le père.)

Yves Collignon joue en parallèle et en alternance deux pièces au théâtre de la Girasole : Long voyage d’Eugene O’Neill et Embrasser les ombres de Lars Noren.

Autres spectacles :

Marx, le retour d’Howard Zinn, mise en scène de Christian Fréguet, au Petit Louvre à 13h30. Texte édité par les éditions Agone.

La dernière scène de et mise en scène d’Alain Foix, au théâtre de l’Albatros.

33 tours et quelques secondes, conception et mise en scène de Linah Saneh et Rabih Mroué. Sera repris à Paris.

Je suis un prophète, c’est mon fils qui l’a dit d’Abel Aboualiten. Au théâtre des Amants à 20h15.

Hôtel Palestine

Conseils pour une jeune épouse de Marion Aubert. Mise en scène de Philippe Fretun.

Et beaucoup d’autres…