Chroniques rebelles
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Samedi 2 avril 2016
Eva no duerme (Eva ne dort pas) de Pablo Agüero
Article mis en ligne le 3 avril 2016
dernière modification le 12 avril 2016

par CP

Qu’est devenu le cadavre d’Eva Peron ? C’est la question à laquelle nous tenterons de répondre en compagnie de Pablo Agüero, réalisateur du film argentin Eva no duerme (Eva ne dort pas).

Une histoire insolite qui parle des pérégrinations d’une défunte. Eva Perón, Evita, reste la figure politique la plus importante de l’Argentine. Son portrait grande échelle surplombe Buenos Aires ; les principaux syndicats et mouvements ouvriers revendiquent son héritage ; l’ex-présidente du pays, Cristina Kirchner, a fait tous ses discours devant son image et évoquait son exemple à l’heure d’affronter les multinationales.

Personne auparavant n’avait abordé la véritable histoire de son corps disparu. Et c’est l’une des histoires les plus incroyables et cinématographiques qui soit. Evita, l’une des grandes figures politiques de l’histoire contemporaine, meurt au même âge que le Christ, elle est embaumée grâce à une technique inédite qui la transforme en « Belle au bois dormant », mais son corps est ensuite séquestré par les militaires et caché par le Vatican, son nom seul provoque des soulèvements populaires pendant plus d’un quart de siècle...

Les coups d’État se succèdent et certains dictateurs veulent détruire jusqu’au souvenir d’Evita dans la mémoire populaire. Son corps devient alors l’enjeu des forces qui s’affrontent pendant 25 ans. Pendant un quart de siècle, Evita a eu plus de pouvoir politique que n’importe quel vivant.

Dans Eva no duerme (Eva ne dort pas), nous assistons à trois moments différents de l’histoire de l’Argentine, avec des scènes théâtralisées chargées de symbolisme et des questions sur le passé, sur le présent et sur le futur du pays.

Le scénario intelligent, solide et parfaitement écrit, démontre avec justesse que rien, ni personne, n’a le pouvoir d’effacer un mythe. Les images sont sombres, souvent sinistres. La violence des dialogues, servis par un casting remarquable, donne une force supplémentaire à cette réalisation ténébreuse, singulière et parfaitement maîtrisée.

Les images d’archives viennent rythmer le film et diverses scènes, telle celle vol du cercueil par un commando militaire, représenté ici par un colonel français, ancien d’Algérie et d’Indochine, incarné par Denis Lavant et un soldat de 2e classe. Autre séquence incroyable, quand Aramburu, le président putschiste, est enlevé et condamné par les Montoneros, les guérilleros péronistes, qui, entre autres choses exigent que le militaire avoue l’endroit où se trouve le cadavre d’Evita.

Pour conclure cette présentation de Eva no duerme (Eva ne dort pas) et souligner l’importance du film au delà du récit, j’aimerais citer les propos de Pablo Agüero lors d’une interview :

« Ce n’est pas un film pour ou contre le péronisme, mais un film contre les dictatures, contre le capitalisme sauvage et pour la liberté et l’égalité de droits. » Et de rajouter
« Ce nouveau film accroît encore plus mon intérêt pour la passion féminine et approfondit ma conviction qu’après des siècles de soumission, nous sommes entrés dans l’ère de la femme. »

Daniel Pinos

Entretien avec Pablo Agüero et Daniel Pinos