L’esclavage, “ la capture et la déportation de quelque 25 millions d’hommes, de femmes et d’enfants ” est évidemment lié au développement du capitalisme moderne, et ce crime — la traite des Noirs qui a duré quatre siècles — perdure dans les mentalités à travers le racisme.
La pratique de l’esclavage, exercée en toute légalité a, en effet, laissé des traces indélébiles aux États-Unis, aux Antilles, au Brésil, en Haïti… avec la justification que les êtres humains capturés, puis réduits en esclavage — s’ils arrivaient au bout du voyage — étaient des sous-êtres.
Brésil, la mémoire perturbée. Les marques de l’esclavage (Ab Irato) est un livre important, un texte de référence comme le Livre noir du colonialisme de Félicien Challaye (Nuits rouges).
Aujourd’hui, “ aucun poing [n’est] levé (ganté ou non) pour dénoncer le racisme antinoir au Brésil, dont les innombrables bavures policières sont la plus parfaite illustration. ”
“ Les 46 % de Brésiliens descendant d’esclaves occupent […] toujours les strates inférieures de la société. [et] Près de 39 % des Noirs sont illettrés ”.
Pourquoi ce phénomène atteint-il cette ampleur dans une société qui passe, aux yeux de certains, pour une société non dominée par le racisme ?
Quatre siècles d’esclavage laisse des marques durables, et l’histoire officielle joue un rôle important dans le façonnage des esprits :
“ La société où vit notre esclave est, de toute façon, une société où l’égalité n’existe pas, ou si peu, même pour l’homme libre. […] En vérité, la fuite est l’expression violente de la révolte intérieure de l’esclave inadapté. […] Il fuit un mode de vie, un manque d’enracinement dans le groupe des esclaves et dans l’ensemble de la société. ” Exemple d’analyse que l’on peut lire sous la plume d’une historienne.
Si l’esclavage est le fondement de l’État brésilien, qu’en reste-t-il aujourd’hui ?
L’histoire officielle poursuit-elle, en manipulant les faits, l’enseignement des idées reçues sur l’esclavage ?
L’esclavage est aboli, mais l’exploitation continue, la violence aussi :
“ Le cas du Brésil n’est pas isolé. Aucun pays n’est sorti indemne de l’esclavage, y compris les États-Unis, où la violence raciste s’exprime avec toujours plus de virulence. Partout, l’esclavage colonial a introduit ce cancer qui fait que beaucoup ont associé une couleur de peau à un statut social naturellement inférieur. ” Brésil, la mémoire perturbée. Les marques de l’esclavage.
La globalisation permet toutes les dérives. De plus en plus, on parle d’esclavage moderne dans le cadre de l’immigration légale et d’accords entre États — notamment venant des pays pauvres — qui livre une main d’œuvre bon marché, corvéable et soumise à des conditions inhumaines de travail. Le constat et la mobilisation sur ce phénomène en expansion nous amènent à poser la question du racisme, aujourd’hui cruciale, et celle-ci en particulier : quelles “ marques ” l’esclavage et, ensuite, le colonialisme ont laissé sur les comportements et les mentalités ?