L’Espoir têtu… Ces deux mots associés qualifient bien le bonhomme. Pour qui connaît Serge, il est gentillesse, modestie et sincérité… Mais il est également têtu, ancré dans ses convictions et ses principes. Un coquelicot, il l’est certes, mais aussi une tête dure — comme on dit — qui défend tranquillement et fermement ses idées. Coquelicot, cœur noir pour l’utopie et rouge franc pour la générosité, la flamboyance des textes et des musiques.
L’Espoir têtu… Nouvel album à la manière d’une transcendance de ce que Serge Utgé-Royo aime, de ceux et de celles dont il s’imprègne avec respect, amour et amitié. Il observe, ce passeur de saynètes vivantes, ce témoin de la vie quotidienne mêlée à l’extraordinaire. Il est comme ça, Serge. Il regarde, toujours avec attention, candeur et curiosité, puis il raconte… Il vous raconte une histoire, une idée, une anecdote simple et essentielle, l’épisode d’un parcours à la fois anonyme et symbolique, une allégorie, une lutte, une rencontre…
Serge le passeur, Serge le diseur, Serge le griot à la langue qui sonne et qui, mine de rien, revient à l’utopie, à son possible, même dans le creux d’une époque morose…
L’Espoir têtu… Un trait de plume qui décrit, une gamme qui installe un climat, un trait de notes pour l’ambiance et la voix fait le reste. De belles chansons, de beaux textes à découvrir sans faute, de même que les musiques de Serge et celles de Léo… Léo Nissim, le complice attentif et minutieux lorsqu’il s’agit de ciseler une musique, un rythme, et finalement un texte. Serge Utgé-Royo et Léo Nissim, ces deux-là font la paire ! Ils échangent même dans les conciliabules silencieux, sur scène ou pendant les répétitions.
L’espoir têtu… C’est bien le Serge que nous connaissons, fidèle et attaché à ses désirs, à ses idées comme l’arapède au rocher : têtu. Il le dit lui-même. Quant à l’espoir, nous sommes, avec lui, nombreux et nombreuses à le partager… Et jusqu’au bout.
J’ai pensé que mes mots
Vous prendraient par le cœur,
Et que mon utopie
Brillerait dans vos yeux...
J’ai pensé que, bientôt,
Des rides de bonheur
Vieilliraient la folie
Et son masque de feu.
(extrait de la première chanson de l’album l’Espoir têtu, J’ai pensé que mes mots…)
Serge, je t’écrirai, peut-être…
J’ai pensé que peut-être nous serions tous égaux,
J’ai pensé que bientôt je retrouv’rais tes rimes
J’ai pensé que nos fêtes jetteraient au tombeau
Les fatigues, les peines au creux de nos poitrines.
J’ai pensé qu’en un souffle, ton chant nous porterait,
J’ai pensé que « possible » était un mot nouveau,
J’ai pensé qu’en ta voix s’abritr’ait mon chevet,
Une nuit où s’abîment tes rimes en chapelets.
J’ai pensé en riant aux princes qui nous gouvernent,
J’ai pensé que leur glas sonnerait dans tes signes,
J’ai pensé au couchant que tous ceux qui nous bernent,
N’auront jamais le cœur à ressentir les lignes.
J’ai pensé que bien sûr nous étions des parias,
J’ai pensé mille fois que vivre est au présent,
J’ai pensé qu’avec toi la musique est au vent,
Ce que la danse est au pas et le rire aux éclats.
Je pense que tu nous donnes du temps, des ritournelles,
Je pense aux hirondelles qui refont le printemps,
Je pense à ta révolte, à cette aube nouvelle,
Qui sans tes chants de lutte disparaît doucement.
Serge, je t’écrirai peut-être
Sur du papier fenêtre
Ou du papier balcon, ou du papier balcon,
Des mots sans queue ni tête
Que tu liras pour être au chaud sous l’édredon, au chaud sous l’édredon.
Un envol de voyelles qu’on sonne ou qu’on épelle, c’est selon la saison.
Un envol de voyelles qu’on sonne ou qu’on épelle, c’est selon la saison.
Serge, je t’écrirai sans doute
Sur du papier mois d’août
Ou du papier soleil, ou du papier soleil
Ces mots que l’on redoute
Qu’on jette ou qu’on égoutte
Pour trouver le sommeil, pour trouver le sommeil.
Des moissons de ratures, des cris en chapelure, au destin des corbeilles.
Des moissons de ratures, des cris en chapelure, au destin des corbeilles.
Serge, je t’écrirai sans ambre,
Sur du papier novembre
Ou du papier frileux, ou du papier frileux
Des pages gris de cendres
Au poivre fin d’une encre
Qui sèche au coin du feu, qui sèche au coin du feu.
Ce jeu épistolaire, et sans destinataire, affiche un bel aveu.
Ce jeu épistolaire, et sans destinataire, affiche un bel aveu.
Serge, je t’écrirai sans pause
En vers velours de rose
Sur du papier folie, sur du papier folie
Le bleu des ecchymoses
Posées en virtuose
Par ton cœur sur mes nuits, par ton cœur sur mes nuits.
Ce bleu flocon de neige, descendu de Norvège, mouille au cœur de Paris.
Ce bleu flocon de neige, descendu de Norvège, mouille au cœur de Paris.
Serge, je t’écrirai sans rime
Sur du papier de Chine
Ou du papier de soie ou du papier de soie
Des printemps anonymes
Au sang de ma sanguine
Que nous ne vivrons pas, que nous ne vivrons pas,
Des fenaisons tardives, aux humeurs fugitives, poussées par le noroît.
Des fenaisons tardives, aux humeurs fugitives, poussées par le noroît.
Puis je tairai ma plume
Sur le papier bitume
Ou le papier trottoir, ou le papier trottoir
Et mettrai sur l’enclume la main qui fit fortune
Sans couteaux ni rasoirs, sans couteaux ni rasoirs.
Elle sentira la masse, du marteau qui préface, la fin d’un bel espoir.
Elle sentira la masse, du marteau qui préface, la fin d’un bel espoir.
Serge, je t’écrirai, peut-être…
Nicolas Mourer
Les textes de Serge Utgé-Royo et Henri Simon à retrouver sur Divergences.be
Les Chats de Liège, Serge Utgé-Royo :
http://divergences.be/spip.php?article2803&lang=fr
Chambre 467, Henri Simon