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Samedi 28 mai 2022
Entretien avec Nour Bader. Clara Sola de Nathalie Alvarez Mesen. Sous les figues de Erige Sehiri. Festival Ciné-Palestine
Article mis en ligne le 29 mai 2022

par CP

Clara Sola
Film de Nathalie Alvarez Mesen (1er juin 2022)

Sous les figues
Film de Erige Sehiri (Cannes. 8 mars 2023)

Festival Ciné-Palestine
Le festival se déroule à Paris et autour jusqu’au 5 juin
Et ensuite du 7 au 9 juin à Marseille

Une voix différente et critique venant de Palestine
Entretien avec Nour Bader

Clara Sola
Film de Nathalie Alvarez Mesen (1er juin 2022)

Très beau premier film qui mêle à l’envi la nature, la prise de conscience, la volonté de s’émanciper et le réalisme magique… Clara, introvertie, presque autiste, souffre d’une déformation physique du dos, et son état est utilisé par sa mère comme une marque divine. Prisonnière des coutumes et des croyances qui se perpétuent dans ce village reculé du Costa Rica, Clara a quarante ans et se rebelle à certains moments dans la maison qui croule sous les représentations religieuses, où les gens du village viennent pour se guérir ou se faire bénir.

Clara prend peu à peu conscience de ses pulsions, de cet enfermement qui l’empêche de vivre et refuse jouer le jeu. Le seul endroit où elle s’épanouit, c’est dans la nature luxuriante entourant la maison, mais que sa mère lui interdit, également avec Yuca, la jument blanche à laquelle elle parle et avec qui elle entretient une relation particulière. Parfois rétives, toutes deux « peuvent être vraies et indomptables. D’une certaine manière, Yuca fonctionne également comme une anticipation à la propre libération de Clara. [Comme le dit la réalisatrice] Elle lutte pour briser les schémas que la société continue de lui imposer. Le lien entre Clara et la nature est souvent filmé de très près, avec beaucoup d’intimité : la façon dont elle touche la jument, les insectes, la boue... »

Le récit est entièrement empreint de réalisme magique par le décor lui-même, par la profusion de la nature, le langage de Clara et sa perception des animaux, des autres personnes et des choses. Et il y a cette touche de féérie qu’apporte la réalisation : « La caméra a parfois une vie au-delà des personnages. L’utilisation de la musique pour élever certaines scènes, présenter les sentiments profonds d’un personnage comme faisant partie intégrante du récit, sont quelques outils que nous avons employés. » Outre la merveilleuse Yuca, la présence de Wendy Chinchilla, qui incarne Clara, transmet également un caractère magique par la gestuelle presque animale, le regard, les absences et les réactions en décalé, comme si elle était possédée par une entité inconnue. Impression qui prend toute sa dimension dans la scène finale de transformation.

Par ailleurs, le film sous-tend une réflexion profonde sur le patriarcat. Ainsi Nathalie Alvarez Mesen développe toute une analyse des normes patriarcales et des discours « hérités des générations passées et déguisés en traditions, même dans les foyers où aucun homme n’est présent. D’une certaine manière, le film pointe du doigt les femmes qui vont dans le sens du patriarcat. J’ai eu envie de pousser ces femmes vers une exploration intérieure, au lieu de répéter les modèles machistes de la famille ou, plus largement, du cercle sociétal. Le plus dur c’est que la plupart des femmes ne savent pas qu’elles alimentent ce fonctionnement – les conventions sont si ancrées dans notre psyché et dans notre corps. Je dois remettre en question ce que je pense savoir ou ressentir. »

Clara Sola de Nathalie Alvarez Mesen est un film riche et fascinant, à voir à partir du 1er juin. Une très belle découverte.

Sous les figues
Film de Erige Sehiri (Cannes. 8 mars 2023)

Présenté à Cannes le 21 mai dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs, Sous les figues se déroule lors de la récolte estivale des figues dans une région pauvre de Tunisie. Des jeunes femmes travaillent avec des hommes à la cueillette, c’est un lieu où se nouent des relations, des drames, s’expriment les frustrations et les difficultés quotidiennes dans une ambiance lourde de manipulation et de domination.
La sortie du film est prévue le 8 mars prochain, nous en reparlerons avec la réalisatrice, Erige Sehiri.

Festival Ciné-Palestine
Le festival se déroule à Paris et autour jusqu’au 5 juin
Et ensuite du 7 au 9 juin à Marseille

Pour sa 8ème édition, Ciné-Palestine se déroule dans plusieurs salles : à Paris, au Luminor, Les Amarres, la Cité internationale des arts, et au Méliès à Montreuil, L’Écran à Saint-Denis, Le Studio à Aubervilliers, Le Concord à Mitry Mory et au Studio Théâtre à Stains.
Site : www.festivalpalestine.paris

Pour cette 8ème édition, le thème choisi est un focus sur les féminismes, c’est-à-dire « mettre en lumière le travail des femmes cinéastes qui s’attachent à mettre en avant la résistances de femmes palestiniennes face à l’occupation ainsi qu’à contester l’hégémonie masculine dans la sphère intime comme publique, des années 1930 à nos jours. »
Il y a également un hommage à Ghassan Kanafani, avec des archives qui montrent la diversité de son travail littéraire et militant. Enfin un concours de courts métrages.

Pour exemples, ce samedi au Luminor (Hôtel de ville) : The Survivor de Seifollah Dad (17h30), des courts métrages de Rosalind Nashashibi (20h). Toujours au Luminor, demain dimanche (19h30), The Stranger de Ameer Fakher Eldin, suivi d’une rencontre avec le réalisateur.
Et surtout ne loupez pas deux films de Maï Masri, lundi prochain, au Mélies de Montreil : Women Beyond Borders (à18h30) et Beirut : Eye of the Storm (20h).
Infos : www.festivalpalestine.paris

Une voix différente et critique venant de Palestine
Entretien avec Nour Bader

Nour bader est une chercheuse féministe palestinienne, autrice de
L’ingénierie coloniale du contrôle des corps de femmes,
Un titre provisoire de son ouvrage en arabe sur la souffrance et la domination du corps des femmes, notamment des prisonnières politiques.
Entretien avec Nour Bader est traduit par Naji El Khatib.

L’entretien est aussi un appel au soutien des prisonnières politiques palestiniennes et dénonce leurs conditions carcérales, l’impossibilité d’avoir des soins, de même que pour l’ensemble des femmes palestiniennes des territoires occupés atteintes de cancer du sein.

Il faut souligner, avec Nour Bader, l’importance du cinéma pour parler de la situation et du quotidien engendrés par l’occupation.
Deux films sont évoqués dans l’entretien : Samouni Road de Stefano Savona (2018) et 3000 nuits de Maï Masri (2017) dont on peut voir des films de la réalisatrice durant le festival Ciné-Palestine.

Musiques par le Trio Joubran : The Age of Industry, Roubbama, Our Final song, Once Upon a Time.


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